- Bloody Maiden
- Messages : 1078
Age : 25
Le Réveil des Démons
Ven 24 Mai - 14:43
Ladies and Gentlemen, boys and girls, children of all ages, Lady Bloody Maiden is proud to present to you Honest's second season of his incredibly long written universe. Bref, si vous avez compris cette petite introduction dans la langue de Shakespeare, vous aurez évidemment compris de ce à quoi ce topic sera consacré.
J'ai débuté la rédaction de cette saison il y a quasiment un an (le 6 juin pour être exact) et à l'instant où j'écris ces lignes (celles du topic), je viens juste de terminer la moitié de la saison. Pourtant, quelques éléments sont à préciser avant que vous ne posiez vos yeux dessus:
- Cette saison s'inscrit dans la continuité du Démon d'un autre monde et par conséquent, elle y contient des spoilers pour celles et ceux qui ne l'auraient pas lu. Pour rappel, le lien est ici : https://faeris.forumactif.com/t46-le-demon-d-un-autre-monde Lisez-là avant de vous immerger dans celle-ci, je vous assure que c'est nécessaire.
- Elle ne comporte pas d'arc à proprement parler, j'indiquerai juste quand on passera sur une partie différente du récit.
- J'avais d'abord l'ambition de réaliser une fic qui égalerait la précédente en terme de volume mais je me suis vite ravisé avant de me rendre compte... ben... ça va être difficile de rester aux alentours des 700 pages prévues. (oui, je calcule toujours en terme de quantité). Donc je le dis et ne m'en cache pas, ça va être une fic fleuve.
- Je conçois qu'il y aura des passages que certains jugeront affreusement chiants et inutile mais... c'est mon projet auctorial et par conséquent, si je les mets, c'est parce qu'il y a une raison.
- J'ai enfin choisi d'utiliser une narration au passé, et pas au présent comme la précédente (je la réécrirai d'ici quelques années)
- Ce n'est pas la dernière saison de mon univers....
- J'essayerai de poster régulièrement, même si je tiens à conserver un peu d'avance, avance qui finira forcément par partir en fumée à un moment où un autre. (mais je garde quand même de la place en matière de posts)
- La taille des chapitres sera variable... Qu'est-ce à dire que ceci ? Disons que j'ai eu quelques problèmes pour la construction du récit en question et du coup, y a des chapitres qui seront bien plus longs que ce que j'ai pu faire. Pour le moment, j'oscille entre 11 et 26 pages. J'imagine déjà la réaction de certains qui vont halluciner et qui vont s'empresser de me dire : "Wesh mé cé supaire long ton truc et ennuieu et j'aime pa. Tu fé de la merde pauvre kon.". Mis à part un fou rire de ma part, je vous répondrai avec un simple "osef".
- Gardez à l'esprit que la seule chose pour laquelle j'écris, c'est mon propre plaisir personnel et rien d'autre... à part me trouver une occupation intéressante, sérieuse et ludique.
- Y a une "préface", un prologue et 58 chapitres, plus un spécial (mais j'en dis pas plus) et un épilogue donc ça laisse de quoi s'occuper.
- Si vous avez une review ou quoi que ce soit d'autre sur ce sujet (critique, interrogation ou bien commentaire), je préfère que ce soit en mp plutôt que sur ce topic (ou Discord, même si je ne suis plus sur le serveur Faeris).
Et si nous passions aux choses sérieuses ?
Préface - Ange vs Démon round II
ATTENTION : CECI CONTIENT DES SPOILERS DU DÉMON D'UN AUTRE MONDE
J'ai débuté la rédaction de cette saison il y a quasiment un an (le 6 juin pour être exact) et à l'instant où j'écris ces lignes (celles du topic), je viens juste de terminer la moitié de la saison. Pourtant, quelques éléments sont à préciser avant que vous ne posiez vos yeux dessus:
- Cette saison s'inscrit dans la continuité du Démon d'un autre monde et par conséquent, elle y contient des spoilers pour celles et ceux qui ne l'auraient pas lu. Pour rappel, le lien est ici : https://faeris.forumactif.com/t46-le-demon-d-un-autre-monde Lisez-là avant de vous immerger dans celle-ci, je vous assure que c'est nécessaire.
- Elle ne comporte pas d'arc à proprement parler, j'indiquerai juste quand on passera sur une partie différente du récit.
- J'avais d'abord l'ambition de réaliser une fic qui égalerait la précédente en terme de volume mais je me suis vite ravisé avant de me rendre compte... ben... ça va être difficile de rester aux alentours des 700 pages prévues. (oui, je calcule toujours en terme de quantité). Donc je le dis et ne m'en cache pas, ça va être une fic fleuve.
- Je conçois qu'il y aura des passages que certains jugeront affreusement chiants et inutile mais... c'est mon projet auctorial et par conséquent, si je les mets, c'est parce qu'il y a une raison.
- J'ai enfin choisi d'utiliser une narration au passé, et pas au présent comme la précédente (je la réécrirai d'ici quelques années)
- Ce n'est pas la dernière saison de mon univers....
- J'essayerai de poster régulièrement, même si je tiens à conserver un peu d'avance, avance qui finira forcément par partir en fumée à un moment où un autre. (mais je garde quand même de la place en matière de posts)
- La taille des chapitres sera variable... Qu'est-ce à dire que ceci ? Disons que j'ai eu quelques problèmes pour la construction du récit en question et du coup, y a des chapitres qui seront bien plus longs que ce que j'ai pu faire. Pour le moment, j'oscille entre 11 et 26 pages. J'imagine déjà la réaction de certains qui vont halluciner et qui vont s'empresser de me dire : "Wesh mé cé supaire long ton truc et ennuieu et j'aime pa. Tu fé de la merde pauvre kon.". Mis à part un fou rire de ma part, je vous répondrai avec un simple "osef".
- Gardez à l'esprit que la seule chose pour laquelle j'écris, c'est mon propre plaisir personnel et rien d'autre... à part me trouver une occupation intéressante, sérieuse et ludique.
- Y a une "préface", un prologue et 58 chapitres, plus un spécial (mais j'en dis pas plus) et un épilogue donc ça laisse de quoi s'occuper.
- Si vous avez une review ou quoi que ce soit d'autre sur ce sujet (critique, interrogation ou bien commentaire), je préfère que ce soit en mp plutôt que sur ce topic (ou Discord, même si je ne suis plus sur le serveur Faeris).
Et si nous passions aux choses sérieuses ?
Préface - Ange vs Démon round II
ATTENTION : CECI CONTIENT DES SPOILERS DU DÉMON D'UN AUTRE MONDE
- Spoiler:
- Voilà, j'ai terminé la rédaction de mon premier tome de mon univers littéraire intitulé Chroniques de la famille Lotyuwi et à présent, je m’attelle à la rédaction de la suite. Et pour commencer, cette préface est en partie consacré à une autocritique du tome précédent. Quels point seront avancés dans cette préface ?
J'ai sans doute dû aborder ce point-là dans la présentation de la première saison mais certains choix sont à expliquer. Par exemple, pourquoi ai-je voulu raconter la quasi-intégralité de l'histoire à travers les yeux de Mina et pas quelqu'un d'autre ? Pourquoi est-ce que cette personne existe dans mon histoire et quelle utilité peut-elle bien avoir dans la narration ? C'est une remarque que j'ai pu voir et je peux aisément y répondre. Si j'ai choisi de mettre Mina en avant comme la narratrice de la saison, c'est parce que, comme cette fiction est centrée sur le thème de Yu-Gi-Oh !, j'ai voulu prendre le point de vue d'une personne qui n'y joue pas. Quant à son utilité, Mina n'est peut-être pas une Duelliste mais elle est avant tout le personnage qui me rappelle le regard des gens qui n'y jouent pas. Elle est aussi la personne qui permet à Dan d'éviter de tomber dans l'oisiveté la plus totale. Et d'une manière plus générale, j'avais envie d'avoir une protagoniste féminine. Il y a aussi le fait que je n'aime pas l'idée de multiples narrateurs à la première personne, et l'idée de mettre en avant un seul Duelliste, en voyant l'histoire à travers ses yeux – ça aurait été Dan en l'occurrence.
Ensuite, il y a quelque chose que je me dois de faire part au lecteur : il y a des chapitres que je n'apprécie guère dans la première saison. Je ne le cache pas du tout. Certains passages donnent clairement l'impression d'avoir été écrits sans la moindre motivation, pouvant contraster sérieusement avec d'autres passages de l'intrigue un peu plus dynamiques. Par exemple, la quasi-globalité du premier arc du Démon d'un autre monde n'est pas vraiment de mon goût. Cela ne paraît pas tellement logique mais je ne vais pas donner la moindre explication. Et pour cause, je n'ai pas tellement d'explication sur la raison qui me pousse à ne pas aimer cet arc. En réalité, j'avais dans l'intention de rédiger ce que j'avais en tête comme une sorte de grand cliché des histoires, des animés et des films que j'ai pu voir avant de me mettre à écrire. Il y a forcément des éléments rébarbatifs et d'autres complètement logiques et qui ne plaisent pas forcément à tout le monde. Il pourrait même ne servir à rien...
De plus, ce problème ne se situe pas uniquement dans l'arc I mais aussi au début du deuxième arc et souvent dans certaines fins de chapitres de l'arc V, comme le Tag Duel entre Nejma et Veneko contre Dilvolg et Andralon. J'ai rédigé les deux chapitres avant des partiels et lorsque je les ai terminés, j'ai eu cette sensation de déception, d'avoir écrit une trentaine de pages d'une qualité immonde et manquant totalement d'originalité. J'avais fait ça le soir, aux alentours de 23h-1h et c'était généralement les moments où j'avais le plus de temps et de volonté pour écrire. Là, c'était un moment flagrant dans ma déception quant à mon écriture mais je ne vais pas changer parce qu'en fin de compte, j'ai lu et relu et j'ai trouvé que c'était pas forcément aussi mauvais que je pouvais le penser, même s'il y a des passages qui font vraiment absurdes... Le manque d'originalité peut facilement m'être reproché mais je n'ai que faire de ça. Ça et la question de la longueur aussi.
Quand on m'a demandé à quoi ressemblerait un peu ce que j'étais en train d'écrire et que j'ai répondu “au minimum 1000 pages” avec un air candide et tout souriant, j'ai eu l'impression que les gens allaient être ennuyés, mais d'une manière vraiment sévère. Le style fic fleuve avec une tendance au bas de gamme par rapport à des textes bien mieux ficelés et plus courts, je m'en fiche complètement. Alors, pourquoi 1000 pages ?
Si j'ai choisi cette barre que je juge symbolique, c'est avant tout pour me tester, voir à quel point je suis capable de me motiver pour produire quelque chose de lisible. C'était la toute première fois que je terminais une histoire qui me trottait dans la tête. Il y en avait eu aussi, des projets d'écriture qui me plaisaient mais je n'ai jamais trouvé la motivation pour les terminer. Là, c'était un univers que j'ai plus ou moins soigneusement développé, dans un cadre spatio-temporel abordable. Je ne vais pas jouer les Michael Bay et placer une explosion à chaque chapitre, à chaque page, à chaque paragraphe, faut pas déconner. Si les lecteurs estiment qu'ils se font chier au tout début, c'est leur opinion, mais j'aimerais quand même qu'ils sachent que l'intégralité de l'histoire n'est pas aussi barbante qu'un téléfilm sur une chaîne publique. Mettre une action soutenue d'un bout à l'autre est quelque chose qui me paraît incroyablement stupide et je n'ai pas tellement envie de procéder de la sorte. Poser un peu l'action de façon ponctuelle est certainement la meilleure façon de rendre une histoire plus agréable. L'idée du “un mort par chapitre” à la Game of Thrones, du “un Duel par épisode” dans les animés Yu-Gi-Oh !, ou encore du “un nouveau personnage, bon ou méchant” par chapitre, c'est pas ce que je recherche.
J'aime beaucoup les passages de flottements, entre autre cette discussion entre Dan et Shizuka en Endlenda, juste après la mort de cette dernière. Je vais être honnête et avouer que ce Duel entre elle et Dilvolg, ainsi que la fin de l'arc IV et l'enterrement de Shizuka, ont été des passages où je me suis senti vraiment mal, parce que j'ai connu cette situation de deuil au cours de la rédaction, même si je n'en étais pas encore à ce moment-là. Si je me souviens bien, c'était avant même que je ne me remette activement à écrire pendant mon année de khâgne. C'était avant les concours de l'École Normale Supérieure en 2017 et c'était après cela que j'ai pu retrouver un rythme d'écriture que je qualifierai d'“hyper fluide” avec près d'un chapitre bouclé par semaine entre avril et juin, finissant au passage l'arc III. Je suis désolé pour cette petite anecdote personnelle mais j'avais envie d'expliquer un peu ce choix de rédaction.
Je reviens à mon explication d'un ennui naissant sur certains chapitres, notamment au début. Selon la taille de l'œuvre, je pense qu'il faut forcément des passages où l'action retombe, avec quelques tendances aux digressions, aux descriptions, aux états d'âme et tout ce qui ne relève pas d'une action brute, à base de virilité, de testostérone, de magie et je ne sais quelle autre chose. Au début, si ça “paraît chiant”, c'est que j'ai besoin de temps pour planter le décor. Sans déconner, une fiction dans ce genre-là, surtout si elle est à l'aube d'un immense projet d'écriture, “ça ne se prépare pas comme un fond de veau” pour citer Merlin. Au milieu de l'histoire, j'ai bien le droit de placer deux-trois choses pour faire en sorte que le lecteur passe sur autre chose.
Je vais prendre un exemple très succinct, et qui me vient totalement par hasard parce que j'écris cette préface au feeling, sans même avoir préparé un brouillon comme je le fais habituellement. Cet exemple, c'est justement la fin de l'arc III, avec la fin de l'expédition des Elfes, lourdement défaite par les Démons – j'aurai quelque chose à redire sur eux plus tard –. L'arc III ne fait pas “suite” à l'arc II en terme de chronologie, elle se passe en même temps, c'est juste que je ne voulais pas me perdre dans le tournoi et dans la mission des Elfes. À la fin de l'arc II, Kaly arrive dans un état proche du coma dans la maison de Dan. Puis, après quelques lignes de dialogue, on passe à l'arc III qui prend place en même temps que le chapitre 06 – donc, arc I –. L'arc III se termine avec le bannissement de Kaly par Nephomet. Là, faut être incroyablement con pour estimer que je devrais mettre à la suite un passage d'action. On m'a fait cette remarque comme quoi, certains passages étaient ennuyeux et celui-là en fait partie. À cela, je réponds : “Non ! Les chapitres 43 et 44 ne sont pas ennuyeux. J'avais envie de mettre un point de rupture dans l'action avec ces deux chapitres. Désolé si ce qui s'y passe est chiant, c'est ton point de vue et tu as le droit de l'exprimer, mais tu ne peux pas me dire que, juste parce qu'il y a des passages chiants, que toute mon histoire est chiante !”. Et en plus de cela, la fin de l'histoire est ponctuée de passages visant à freiner un peu sur l'adrénaline, surtout en ce qui concerne les discussions.
Une fiction, ou du moins, la mienne, ça se comprend et s'analyse dans son intégralité et non chapitre par chapitre. Si on veut en faire une critique pertinente, on la fait lorsqu'on a terminé de la lire. Par contre, je tiens à préciser que le mini prologue du Démon d'un autre monde est à exclure, sauf la dernière partie, car elle évoque les tomes qui la précèdent et que je n'ai pas encore commencé à rédiger. Et je tiens à ajouter que, selon l'état dans lequel on se trouve lorsqu'on lit tel ou tel passage, notre jugement sera forcément différent si on est pleinement joyeux ou complètement dépressif. Si on est froid à l'égard du monde et qu'on lit certains extraits, alors forcément, on trouve ça chiant. Des choses échapperont toujours à l'œil d'un lecteur peu avisé.
Faire des reviews de chaque chapitre n'est pas quelque chose qui me dérange, bien au contraire. Analyser le style, l'ambiance crée, dire ce qu'on pense des personnage et du tout en général, dire qu'on se fait chier, ça ne me gêne pas. Mais dire que la suite sera forcément du même acabit sans même l'avoir lu, c'est limite se foutre de la gueule du monde. Si on n'analyse pas l'intégralité de l'arc et du contexte, c'est comme donner un coup d'épée dans l'eau. Non seulement c'est inutile, mais en plus, les autres – ou en l'occurrence, l'auteur – va ou vont vous prendre pour des cons.
J'en viens ensuite aux personnages. Je vais faire un peu mon autocritique et répondre à ce que j'ai pu lire comme commentaires. Je me suis déjà expliqué à propos de Mina donc je vais passer sur le personnage de Warren. La vision qu'on a de ce personnage ne dépend pas uniquement du ressentiment qu'on en a lorsqu'on le croise pour la première fois. Quand on se retrouve face à une œuvre aussi colossale, il y a forcément des évolutions au fur et à mesure que l'histoire avance. Donc, si Warren passe pour un “collégien rebelle” au début et qu'il n'est pas aimé, c'est exactement comment j'ai voulu le dépeindre à ce moment précis de l'histoire. Je l'ai crée pour qu'il se fasse détester. Je me suis un peu inspiré du personnage d'Alex DeLarge dans L'orange mécanique d'Anthony Burgess, du moins pour le tout début.
Des personnages connaissent peu d'évolution en matière de caractère et, c'est un peu parce que je ne maîtrise pas toutes les ficelles de la narration, je dois l'avouer. Nejma et Veneko en sont malheureusement les deux exemples phares. Il y a bien ce moment vers la fin de l'arc V lorsqu'ils se trouvent face à face avec leurs parents, possédés par Dilvolg et Andralon, où on peut constater un très léger changement chez eux mais sans plus. C'est d'ailleurs un des défis que je me suis fixé sur cette deuxième saison.
Sinon, Kaly n'évolue pas des masses parce que ce n'est pas tellement dans son genre de changer. C'est une Elfe après tout et j'essaye de faire en sorte que leur personnalité ne change pas ou très peu. Dan est l'exemple du personnage, en plus de Warren, que j'ai vraiment essayé de changer par rapport à la perception que j'en avais au début. Pourquoi ? Déjà parce que c'est le personnage principal et que l'intégralité de mon univers littéraire tourne autour de sa famille – j'expliquerai sans doute cela à la fin de cette préface –. On peut penser qu'il me ressemble un peu pour ceux qui me connaissent dans la vie mais ce n'est pas le cas. Dan et moi sommes à des années-lumières en matière de comportement et de personnalité. C'est un véritable surdoué, disposant d'un quotient intellectuel de plus de 190, polyglotte, qui serait facilement capable d'enseigner à des élèves se destinant à des études vraiment complexes, qui serait capable de se battre contre les meilleurs combattants au monde. Bref, j'en fais un peu un sur-homme, une sorte de caméléon capable de se fondre dans n'importe quel univers – ceux qui savent de quoi je parle me comprendront –. J'ai parsemé une partie des arcs IV et V de descriptions de son caractère, de sa personnalité, d'anecdotes d'enfance et de ses qualités et défauts.
Je reviens aux personnages en général. Certains peuvent, à juste titre, estimer que des histoires avec trop de personnages, c'est nul ou bien que le résultat est peu probant. Le fait d'augmenter le nombre d'individus diminuerait la qualité de ceux qui paraissent plus intéressant, et que le reste ne serait composé que de demeurés... J'ai pu lire ça quand j'ai pu discuter avec des gens à propos de leurs goûts en matière d'animé et de fiction... Pour ça, je n'ai qu'une réponse claire et nette : Chacun ses goûts. Je ne vais pas vous émasculer en public à l'acide parce que vous appréciez les histoires centrées autour d'un ou deux individus au détriment de celles qui mettent en avant un certain nombre. Dans Le Démon d'un autre monde, j'ai voulu mettre ce petit groupe de cinq personnes – Dan, Mina, Nejma, Veneko et Warren –, déjà pour la symbolique des cinq doigts de la main, ce dont je viens tout juste de me rendre compte, je dois l'avouer. Il y a bien évidemment d'autres personnages qui sont secondaires ou bien en “protagoniste et demi”, comme Alicia, Klothilde, Shizuka et les principaux Elfes. Ça ne relève que d'un choix personnel.
Je suis d'accord sur un point et critiquer un peu ce que j'ai pu faire, surtout dans les... disons, quinze premiers chapitres du Démon d'un autre monde. L'intrigue peut paraître plate, tout comme les discours, les clichés... Si les personnages paraissent plats au début, c'est que je ne peux pas faire autrement. Je l'ai dit et je le répète, c'est la première fois que j'écris une histoire qui soit autre chose qu'un devoir à faire en classe. Je suis d'accord sur le fait qu'à certains moments, c'est affreux à lire, mais pour moi – pour les autres, je ne sais pas – l'objectif est de me persuader qu'à la fin de l'histoire, lorsque je lis l'épilogue, j'ai pu constater une évolution chez le personnage. Je dois me dire qu'à la fin, telle personne a changé, que j'ai fait en sorte qu'elle soit nettement mieux décrite, qu'elle s'exprime largement mieux qu'au début où elle pouvait paraître plate. Retournons sur le cas de Mina. Au tout début, j'avais la sensation que je n'arriverais pas à faire grand chose avec ce personnage. Et lorsque j'ai imaginé la trame détaillé des arc IV et V, que j'ai décrit comment elle serait retenue prisonnière par Warren, une fois que celui-ci a été défait par son père, et surtout les conditions de son enfermement, son espoir d'être libérée et bien évidemment, le moment où elle était sur le point d'être pendue dans le vide, et tout ce qui s'en suit ; c'est là où je me suis dit que cette étape allait changer le caractère de Mina, pour en faire quelqu'un d'assez sensible, et qui peut se révéler d'une grande force émotionnelle, avec une grande empathie pour les autres. Ce n'est peut-être pas flagrant mais c'est comme ça que je perçois cette évolution.
Si on se penche sur le cas de Dan, il ne faut absolument pas négliger le chapitre spécial “Livre d'Or” qui clôt l'arc II. Là, on a un panorama de l'enfance de Dan, que je ne pourrais pas mettre en scène dans un tome de mon univers littéraire, parce qu'il n'y aurait rien à raconter. Au début du Démon d'un autre monde, on peut penser que Dan est juste un mec edgy qui se fiche totalement des cours et qui est clairement incroyable quand on le regarde d'un peu plus près. Il ferait même partie de ces clichés que certains estiment imbuvables. Et le chapitre du “Livre d'Or” dévoile complètement le fond du personnage. C'est une remarque qu'on a pu faire, à savoir le côté plat des personnages, comme quoi, pour créer un individu jugé excellent, il faudrait faire une biographie détaillé, avec les éléments antérieurs et postérieurs à l'intrigue... Ce n'est pas quelque chose que je vais critiquer et nier parce que je m'en sers dans la saison qui suit, notamment pour trois personnages. Le problème réside dans un élément que je vais résumer en un seul mot : spoiler. Je ne peux pas mettre en scène certains éléments parce qu'ils dévoileraient la nature d'un ou de plusieurs individus avant même que je ne puisse trouver l'endroit exact où les révéler.
Si ce que je dis n'est pas clair, ce qui est fréquent chez moi, prenons l'exemple de Warren, qui est révélateur de ce que j'essaye d'expliquer. Dans l'arc I, on apprend qu'il a été chassé de chez lui par son père, qui avait pour habitude de le battre, puis plus tard dans l'histoire, il s'installe chez Dan. J'ai fait exprès de ne pas mentionner ne serait-ce que la moindre parcelle de son histoire personnelle parce que j'avais prévu depuis le début d'en faire le fils d'un des Démons. Or, si je l'avais mentionné avant le Duel entre Warren et Eyazon aux chapitres 54-56, l'effet recherché au chapitre serait tombé à l'eau dès le début. Après, ça peut paraître capillotracté mais c'est justement ce que je voulais. Si j'avais placé dès le début le fait que le père de Warren s'avérait être un immonde connard dont le but est de servir un Démon mégalomane, la réaction de ce dernier lorsqu'il voit son visage après l'invocation de son monstre Xyz n'aurait été que plate. En plus, je fais une sorte de “reboot” de son côté bad guy mais je l'estime bien meilleure qu'au début. De plus, s'il se comporte comme un gamin au début, c'est avant tout une question de psychologie. Il n'aurait jamais chanté à tue-tête le fait qu'il se soit fait virer de chez lui ou bien qu'il se serait fait battre par son père. Une enfance traumatisante ne se révèle jamais, même aux individus que l'on estime être extrêmement proches. Je suis d'accord sur le fait que l'attente est plutôt longue mais c'est comme ça.
On peut aussi taxer le passage de cette révélation comme étant un plot-twist pourri mais je n'ai jamais dit que ma fic avait pour but de rester pleinement cohérente d'un bout à l'autre. Déjà, quand on place des voyages dimensionnels, avec un monde fantastique où la magie existe, on est sûr de se torcher avec une partie du réalisme.
Je vais passer un peu sur les personnages des Démons et du groupe de délinquants. Ils ont cette image de “débiles incompétents” et, je dois avouer que je suis d'accord sur le fait que le groupe de délinquants est en partie raté. Même moi, je n'ai pas aimé la façon dont je les ai mis en scène. Et c'est en partie pour ça qu'une partie de l'arc II n'est également pas de mon goût. Cela ne me fait pas trop mal de l'accepter parce que... les passages en question n'étaient pas le fruit d'une réflexion lors d'une bonne période mentale. C'est là où je me laissais complètement aller sur les intrigues absolument abracadabrantesques et... ben, je ne vais pas procéder à une réécriture. Je vais laisser ça comme c'est actuellement parce que j'estime que, peu importe les conneries qu'on peut écrire, les garder permet de voir la marge de progression qu'il nous reste à atteindre.
Un autre élément qui me paraît intéressant, que j'ai déjà pu évoquer dans la précédente préface mais qu'il me semble bon de développer, avant d'en faire une éventuelle description et carte dans un tome qui arrivera dans plusieurs années, c'est la question de la ville de l'intrigue, Akinokuwa. On m'a demandé une fois si c'était bien une ville japonaise ou non. J'ai mis que c'était une ville japonaise, mais que son architecture et son organisation était fortement influencée par l'Occident. Lire serait un peu bénéfique car cela éviterait ce genre de question. J'y ai répondu dans la préface précédente, donc elle fait partie de l'histoire et n'est pas à négliger. J'ai donné des clés pour comprendre certaines choses avant de passer dans le vif du sujet. Si on ne la lit pas, du moins, si on ne lit pas la dernière partie, on aura sans doute plus de difficultés à comprendre certains points qui peuvent paraître obscurs. On est focalisé sur ce côté borné qui peine à comprendre certains de mes choix et après, on dit que c'est chiant à lire. Si on ne lit pas tout, on ne comprend pas tout, c'est d'une logique implacable. Et ce genre de reproche peut être adressé par quelqu'un qui écrit aussi... Alors, quand on écrit un truc qui est chiant de base, où il ne se passe rien, avec des personnages pour lesquels on ne ressent aucune émotion, où on reprend l'univers de quelqu'un d'autre, le mieux est quand même de se taire...
Maintenant que certains points de la première saison ont été expliqués et critiqués, je vais passer sur une explication de la saison qui va suivre. J'évite de mentionner le titre de cette saison parce que je n'ai pas encore d'idée exacte d'intitulé pour celle-ci. Autant pour Le Démon d'un autre monde, j'avais tout en tête, autant ici, j'ai tout sauf le titre de l'histoire... Bref, je digresse.
La deuxième saison – puisqu'il y en aura d'autres après celle-ci – a lieu en 2018, donc deux ans après les événements de la première saison. Le plus grand défi pour moi, c'est d'éviter de faire un copier-coller exact de la première saison. Je vais essayer des techniques de narration différentes, et ce sera surtout visible dans la troisième saison, qui, je le dis ici et maintenant, clôturera l'arc de Dan. Je vais essayer aussi de faire en sorte que le gros de l'intrigue change un peu, tout en restant complètement clair pour le lecteur. Sur le scénario que j'ai pu réaliser, j'estime qu'il y aurait plus d'un tiers, si ce n'est davantage, d'éléments différents.
Bien évidemment, il y a des personnages qui seront absents, comme les trois lieutenants de Nephomet, le groupe de loubards, Elhahr et surtout Shizuka, qui était le personnage du Démon d'un autre monde que j'affectionnais le plus, bien plus que Dan ou Mina. Et je sais que je risque d'énerver certains en annonçant qu'il y aura de nouveaux personnages, mais cette fois, j'essaye de les développer plus en profondeur, de leur donner une vraie psychologie, que j'estime absente de la plupart de ceux présents dans le tome précédent. Et c'est quelque chose que j'approfondirai dans les tomes qui vont suivre. Je précise aussi que je ne ferai pas de narration à la première personne. Et petite précision, je serai amené à modifier un peu la date de création du jeu de cartes, la faisant reculer de 1996 à 1988 pour des raisons de cohérence scénaristique.
Je ferai un découpage en arc comme dans la première saison, mais cette fois, ce sera bien moins important que pour le premier pavé. À l'heure où j'écris cette préface, je ne sais pas du tout à quoi ressemblera ce découpage. Et c'est directement en lien avec la longueur estimée de la saison. Le Démon d'un autre monde était censé faire plus de 1100 pages, avec 91 chapitres, plus quatre spéciaux, la préface, le prologue et l'épilogue. En définitive, j'ai été obligé de revoir un peu mes estimations puisque six chapitres ont disparu de la trame principale, soit parce que je n'avais pas d'idée pour tenir douze pages – et j'aurais sans doute pu développer un peu la narration sur les démons mais comme leur rôle était plutôt d'observer, il n'y avait pas grand chose à raconter – ; soit parce qu'ils faisaient un peu doublon avec un chapitre suivant ou précédent ; ou bien parce qu'il tranchait net avec un passage d'action et que cela serait mal retombé. Du coup, la version numérique avec les mises en page s'élève à 1076 pages, ce qui me rend plutôt content. Et là, pour cette saison, ainsi que les suivantes, je vais abaisser un peu la barre en terme de pages rédigées et du nombre de chapitres. En gros, je vais essayer de rester au niveau des 700 pages. Petite précision : les chapitres seront parfois bien plus longs, atteignant jusqu'à vingt pages. J'aimerais faire moins mais cela contrasterait beaucoup avec Le Démon d'un autre monde. Et il y aura encore ce problème de concordance des temps qui n'est pas vraiment mon point fort dans l'écriture. En tout cas, bonne lecture !
- Bloody Maiden
- Messages : 1078
Age : 25
Re: Le Réveil des Démons
Ven 24 Mai - 14:44
Prologue - Errance...
- Spoiler:
- Au moment où la ville célébrait la fin de l'invasion de ces créatures démoniaques, la joie s'était répandue aux quatre coins du pays. L'obscurité prit fin, la couche nuageuse étant violemment transpercée par les rayons purificateurs de l'astre solaire. Des feux d'artifices étaient tirés en symbole de paix retrouvée. L'heure était à présent à la reconstruction à Akinokuwa ainsi qu'à l'hommage de ceux qui ont péri pour que cette paix soit de nouveau en place. L'ultime combat qui opposa le Démon au jeune Dan Lotyuwi s'est déroulé à une altitude si élevée que pratiquement personne n'a pu voir le détail de ce Duel. Personne ne serait en mesure, excepté Dan, de faire un compte rendu détaillé de ce qui s'est réellement passé. D'ailleurs, ce dernier n'a jamais répondu de manière positive aux demande d'interviews des journalistes du monde entier. Il n'avait que trop souffert pendant cette rude bataille, aussi bien physiquement que psychologiquement. La seule chose qu'il voulait, c'était oublier ce qu'il a vu et qui le hanta pendant des mois.
À présent, le jeune homme devint le maître de maison au 26, Kamen Street, se fiança avec sa petite amie Mina Mizunori, à qui il avait déclaré son amour en plein milieu de cette guerre terrifiante. Tous deux semblaient reprendre une vie normale, malgré les traumatismes qui ont secoué cette belle ville d'Akinokuwa. Ah ! Dame Akinokuwa, comme le disent les habitants les plus anciens... Elle a énormément souffert pendant ces rudes combats, et fut inondée du sang de moult victimes, tant démoniaques qu'humaines. Les dégâts matériels furent considérables, tant dans certains quartiers que d'autres. Et les photos des Duellistes aidant aux reconstructions firent le tour du monde. Petit à petit, la ville que l'on connaît désormais sous le nom de “Fléau des Démons” renaquit de ses cendres et devint encore plus flamboyante qu'elle ne l'était, la faute à une créature ignoble venue d'un autre monde... une créature dont le nom hantera à jamais les esprits de ceux qui se sont battus ici... une créature répondant au nom de... Nephomet.
En ce qui concerne les Duellistes, nul ne sait ce qu'il est advenu de lui à la fin de ce Duel. La question fut posée à Dan, la seule personne qui pouvait être en mesure de donner une réponse, mais ce dernier répondit soit par la négative, soit ne donna aucune réponse. La dernière chose dont il se souvient, c'était d'avoir activé une carte Piège, L'Ange Mourant, et du monstre qu'il avait sur son Terrain, le tout-puissant Ange Démon – Roi Lumineux, aussi connu sous le nom elfique d'Elhahr, ancien Seigneur du Palais d'Endlenda, tué au combat par ce même Nephomet. La lumière et l'intensité de cette attaque eurent embrouillé la vue de Dan, à tel point qu'il est redescendu du ciel dans un état proche du coma. Nephomet avait péri dans l'explosion issue de cette attaque. Fini, fin de l'histoire ! La guerre était terminée ! “Ce démon est mort et il ne reviendra pas...”, assurait Dan.
Loin de tout ce tumulte lié à cette guerre, dans le district d'Akkeshi, à Hokkaidō, vivait un jeune homme, dans une maison plutôt isolée. Il était alité, dans une chambre moyennement éclairée, un magazine datant du 14 août 2016 traînant sur la table de chevet. Un Disque de Duel avec un paquet de cartes se trouvait au-dessus d'une petite boîte dans un placard avec deux manteaux. La porte de ce placard était cassée et l'on pouvait distinguer clairement ce qu'il y avait. Après tout, cette chambre dans laquelle ce jeune homme se trouve est plutôt petite. Un lit, deux tables, deux chaises, un petit placard, une porte donnant sur une mini salle de bain et une autre sur le couloir, une fenêtre ouverte avec des rideaux mités... rien de bien important. Le vent s'engouffrait dans cette petite chambre et cela ne semblait pas déranger cet homme étendu sur ce lit. Dehors, quelques rayons de soleil illuminaient le sol au pied du lit. Quelques chants d'oiseau et le bruit plutôt paisible des vagues qui s'écrasaient contre la falaise... Un endroit idéal pour être tranquille et profiter d'un bon repos.
Pourtant, le jeune homme en question était inexpressif, il ne dormait pas, gardait les yeux pleinement ouverts et son visage ne laissait passer aucun sentiment. Ses petits yeux bleus sombres étaient clairement vidés de toute vie. Apathique, il ne faisait rien d'autre que d'écouter les va-et-vient de cette force marine qui ne cessait jamais. Ça, et rien de plus. Il tourna la tête de quelques degrés, pour avoir une photo qui se tint sur la table de chevet, juste devant ce vieux magazine datant de deux ans. Ses yeux vides de vie se posèrent sur ce cadre qui le montre, debout, entouré de ses parents. À sa gauche, un homme plutôt joufflu, portant un complet bleu marine, avec des petites lunettes devant ses petits yeux bleus sombres, un grain de beauté sur le bas de la joue gauche, une petite moustache bien taillée, un sourire amical. Le genre d'homme qui ne vous voudrait aucun mal, et qui serait même prêt à vous aider si vous aviez des gros travaux à faire chez vous... bref, le genre d'homme qui aime rendre service. Et à la droite du jeune homme se trouve une femme plutôt élancée, dont le front comporte quelques rides, des cheveux mi-longs coiffés en chignon grisonnants, un nez pointu et un air plus sévère mais quand même amical. Ces deux personnes ne semblent nullement agressifs.
Soudain, des bruits de pas se firent entendre près de la chambre du jeune homme. Quelques secondes plus tard et cette femme, celle présente sur le cadre photo, apparut dans l'entrebâillement de la porte, ses grands yeux verts posés sur ce jeune homme alité. D'un coup d'avant-bras, elle ouvrit la porte, laissant entrevoir un plateau dans ses mains. Elle portait un grand kimono pourpre et avança doucement en direction du lit. D'un regard mêlant tristesse et empathie, elle s'adressa au jeune homme :
- Est-ce que tout va bien ?
Elle n'obtint aucune réponse, ce qui la fit sourire. Pourquoi ce sourire ? Elle savait pertinemment qu'elle ne pourrait plus entendre la voix de son fils. Cela faisait désormais quinze ans qu'il est couché dans ce lit, sans pouvoir en sortir. Il ne pouvait même plus prononcer le moindre mot, la faute à une maladie rare diagnostiquée il y a justement quinze ans. La pauvre femme ne le savait que trop bien. Des larmes commencèrent à couler sur ses joues fatiguées, comme à chaque jour qui s'écoulait.
- Je t'ai préparé quelque chose à manger, dit-elle en posant le plateau sur les jambes de son fils.
Le jeune homme ne fit que cligner des yeux. Une seule fois suffit à faire comprendre à sa mère qu'il l'en remerciait. C'était sa seule façon de communiquer avec les autres. Un clignement pour un oui, deux pour un non. Il ne pouvait pas faire autrement. C'était un supplice total pour ses parents, de devoir s'occuper d'un jeune homme qui allait avoir vingt-trois ans en juin de cette année 2018. Son père travaillait dans une petite entreprise, étant un simple employé comptable. Ce n'était évidemment pas ce qu'il rêvait de faire, mais cela suffisait pour faire vivre sa famille. De temps à autre, il réussissait à acheter une bricole pour tenter de faire plaisir à son fils. Ce fut le cas du Disque de Duel et des cartes qui se trouvaient sur cette table dans cette chambre. À l'époque où ce jeune homme n'était pas dans cet état à moitié végétatif, il s'amusait à jouer et à s'imaginer champion de Duel de monstres.
La femme regarda ce Disque de Duel et se remémorait ces moments où son fils était “le plus heureux des enfants” lorsqu'il tirait ces cartes et qu'il s'amusait à les jouer. Et sur ce Disque de Duel, une petite étiquette était collée juste en dessous du bouton permettant de l'allumer : KANJI RINZŌ. Voilà comment il s'appelait. C'était le nom que lui avaient donné ses parents. Est-ce qu'il l'aimait ? À vrai dire, ce n'était pas le genre de question qu'il pouvait se poser. À quoi pouvait-il bien penser ? Pas grand chose malheureusement... Il n'a quasiment pas bougé de ce lit pendant près de quinze ans, ne se déplaçant que très rarement avec un fauteuil roulant, qui se trouve à côté de la porte.
En voyant son Kanji dans cet état-là, il était impossible que ses parents ne ressentent pas une tristesse incommensurable. Quinze années dans cette misère la plus intense, et peu de monde pour leur venir en aide. Ils n'ont quasiment plus aucun membre de leur famille en vie et n'ont pas les moyens suffisants pour pouvoir offrir des soins pour leur pauvre fils. Ils n'avaient que très peu de relations avec le monde extérieur, expliquant ainsi le fait qu'étant petit, Kanji était tout le temps tout seul à l'école. Près de quinze ans plus tard, il était toujours isolé, mais n'y pouvait absolument rien... seule sa tête pouvait esquisser le moindre mouvement, du moins, si l'on pouvait parler de “mouvement”.
Soudain, tandis que les yeux inexpressifs de Kanji étaient fixés sur le visage mélancolique de sa mère, un courant d'air bien plus inhabituel traversa la pièce, faisant au passage tomber le rideau. Ce courant d'air était vraiment singulier pour Kanji. Le jeune homme passait la quasi-totalité de ses journées à se faire caresser le visage par le vent. Il s'était habitué à toutes ces rafales, de la simple brise d'été à la violente bourrasque. Pour rien au monde, il n'aurait voulu qu'on ferme cette fenêtre, celle à travers laquelle il lui arrivait de s'imaginer quelques histoires. Et ça, ses parents l'avaient parfaitement compris. Or, ce qui venait de se produire attira l'attention du jeune homme qui, instantanément, mobilisa ses quelques forces physiques dans la direction de ce vent froid qui, habituellement à cette période de l'année, n'avait pas pour habitude de lui donner une impression de claque particulièrement violente sur la joue. C'était ce qu'il en ressentait, lorsque sa mère voulut fermer la fenêtre et remettre le rideau à sa place.
Mais... une seconde rafale du même acabit survint et brisa la fenêtre. Cela surprit totalement les deux personnes dans cette petite chambre, étant donné qu'il s'agissait de double-vitrage. On ne savait pas comment un simple petit courant d'air dont la vitesse n'était sans doute pas plus élevée que 30 km/h. La mère de Kanji en tomba même à la renverse et quelques petits débris de verre s'étaient plantés dans la peau de sa main. Elle se demandait comment cela a pu se produire. Il n'y a personne aux alentours, la maison étant près d'une falaise et à vingt-huit kilomètres du centre-ville le plus proche, là où travaillait monsieur Rinzō. L'atmosphère déjà maussade dans la chambre devint encore plus étrange et pesante lorsqu'une voix grave semblait chuchoter :
- Je t'ai trouvé...
Madame Rinzō n'était pas folle. Elle avait bien entendu ces quelques mots. Elle se releva et débarrassa sa main des trois-quatre morceaux de verre. Elle balayait la petite chambre de son regard et en vint à la conclusion suivante :
- Est-ce qu'il y a quelqu'un ?
Mis à part son pauvre fils alité, il n'y avait qu'elle dans cette petite chambre. Son mari était en train de se reposer dans le séjour et n'avait pas entendu le bruit de la fenêtre se briser. Elle se dit alors que ce n'était que le fruit de son imagination, imagination qui la poussait à entendre de nouveau son fils parler. Bien évidemment, cela faisait quinze ans que cela ne s'était pas produit et elle pouvait espérer encore et encore, cela ne risquait pas de changer au fil du temps. Après s'être de nouveau assise au chevet de son fils, elle entendit de nouveau cette voix grave :
- Un corps faible... une volonté détruite... Je t'ai trouvé...
- Qui... qui est... qui est-là ? bégayai-t-elle.
Elle n'obtint pas de réponse. Ce fut à ce moment-là qu'elle se demanda si la maladie de son fils n'avait pas commencé à lui faire perdre la raison. Elle le regarda et ne vit rien d'autre que son visage inexpressif et maladif. La pire chose qui puisse arriver pour un parent, c'est bien de voir son enfant malade et de ne rien pouvoir faire pour le guérir.
- Je suis là maintenant... Tu n'as plus rien à craindre..., répéta la voix.
Aussitôt, la panique commença à gagner madame Rinzō. Elle se saisit du couteau qui était sur le plateau qu'elle a amené pour son fils et le brandit devant elle. Les gouttes de sueur apparurent quasi-instantanément une fois la lame dans les mains. Les mots de cette voix grave continuaient à résonner dans cette petite chambre, tandis que la mère de Kanji tentait d'appeler son mari à l'aide. Mais elle aussi est en quelque sorte devenue aphone et son appel fut vain. Le courant d'air gelé traversa une nouvelle fois la chambre, mais cette fois-ci, de manière plus durable.
- Que se passe-t-il ? disait la femme, dont le teint commençait à pâlir.
Elle ne saurait expliquer comment, mais ce courant d'air était à présent en train de tourbillonner dans la chambre, de la même manière que la foudre en boule dans le salon du Professeur Bergamotte. Au fur et à mesure qu'elle rebondissait sur les murs, elle commença à prendre une teinte violacée, dans l'ambiance obscure de cette chambre. La mère de Kanji n'en revenait pas. Elle appela une nouvelle fois son mari, et ce dernier finit par accourir en direction de la chambre de son fils unique.
- Qu'est-ce que... ? disait-il lorsque son regard croisa l'étrange sphère pourpre trônant en-dessous du petit lustre de la chambre.
Malheureusement, sa femme était bien incapable de répondre pour lui. Cette dernière alla même jusqu'à se serrer contre lui, étant complètement terrifiée. Tous deux assistèrent, impuissants, à cet étrange événement. Cette petite sphère dont la couleur prit la teinte d'une lilas était en train de virevolter au-dessus du corps inerte du jeune Kanji. Elle bougeait d'elle-même, comme s'il s'agissait d'une luciole mais... dans leurs souvenirs, elles ne produisaient pas du tout cette lumière. Cela ne semblait pas être un insecte, ni un quelconque animal... mais de quoi pouvait-il bien s'agir ?
Le père de Kanji tenta alors de saisir cette petite boule, dont le diamètre était sensiblement équivalent à cinq centimètres. Il s'avança, hésitant tout particulièrement lorsque ses deux mains se trouvèrent au même niveau que cette petite sphère lumineuse. Il fit le compte de trois dans sa tête avant de les refermer avec une telle violence que l'on aurait cru qu'il s'attaquait à un vulgaire moustique qui le dérangerait en pleine nuit.
- Voilà... elle n'est plus..., dit-il avec un grand sourire.
- Pathétique..., dit une voix grave, la même voix.
- Comment ?
Tout à coup, les mains du père se mirent à chauffer. C'était identique à un toast dans un grille-pain que l'on mettrait en marche. Les paumes collées de ses mains semblaient si brûlantes au fur et à mesure qu'elles étaient jointes. Il tenta de les séparer, dans un réflexe salvateur, mais il en était incroyablement incapable. Des cris de douleur commençaient à résonner dans la petite pièce tandis que son épouse était figée sur place. Elle n'avait pas la moindre idée de ce qui était en train de se dérouler sous ses yeux et était bien incapable de faire quoi que ce soit.
- Tu ne m'empêcheras pas d'accomplir mon destin... humain ! lança la voix, qui avait l'air de provenir de cette petite sphère, pourtant entre les mains fermes et “soudées” du père de Kanji.
Tout en poursuivant dans le surnaturel, le pauvre mari fut instantanément projeté lourdement contre la porte de la chambre. Comme dans une posture de crucifixion, ses mains lui infligeaient une douleur telle qu'hurler n'assouvirait même pas sa peine. Ses mains devenues incandescentes le faisaient désormais souffrir de l'intérieur. Il y avait même des points de lumière sur les paumes. Cette fois, son épouse tenta de lui venir en aide mais elle n'arrivait même pas à bouger son bras immobile sur le bois de la porte. Mais ce n'était pas le plus étrange, parce que la boule de lumière continuait à s'agiter comme si de rien n'était. Elle s'était arrêtée, cette fois juste au-dessus du corps toujours aussi inerte et inexpressif de Kanji. Ses deux parents, apeurés, ne pouvaient esquisser le moindre mouvement, assistant, impuissants, à la lente descente de la boule lumineuse directement en direction du cœur du jeune homme.
- Enfin..., résonna la voix grave.
Et soudain, elle disparut du champ de vision des parents de Kanji. Elle pénétra la couverture et s'enfonça droit dans cet organe cardiaque. Mais ce ne fut pas le phénomène le plus dérangeant qui soit depuis le début de toute cette petite scène. Monsieur et madame Rinzō n'en étaient pas au bout de leur peine lorsque le corps de leur fils unique et souffrant le martyr devint aussi incandescent qu'un tube fluo dans une discothèque au beau milieu de la nuit. On était clairement loin de toute atmosphère joyeuse dans cette famille, les parents étant fréquemment sous le coup de crises de dépression. Mais là, ce qui se produisait sous leurs yeux dépassait de loin tout ce qu'ils avaient pu voir d'étrange dans leur vie.
La vue du corps du pauvre Kanji baignant dans cet éclat zinzolin effraya sa mère, qui tenta, dans un souffle de désespoir le plus inconscient, de le sortir de son lit. La dernière fois que son fils fut sorti de son lit, c'était il y a quatre ans, afin qu'il puisse voir une nouvelle fois le soleil resplendir sur la mer qui borde la falaise. Une “nouvelle” ? Ne serait-ce pas plutôt... “dernière” ? Les médecins qui s'étaient penchés sur le cas de Kanji, alors âgé de sept ans, lui avaient diagnostiqués une espérance de vie légèrement supérieure à vingt ans. Il se sentait proche de la fin et refusait pratiquement toute demande de sortie dehors, sans doute pour éviter de se rappeler ce fatum tragique qui pesait sur sa pauvre tête, tel une épée de Damoclès. Tout ce qu'il voulait depuis cette dernière sortie, c'était perdre toute notion du temps, ce qui pourrait expliquer l'absence totale de télévision ou bien d'horloge dans cette chambre, ou bien le fait que les rideaux étaient constamment tirés, afin d'éviter de voir les trajets quotidiens des astres solaire et lunaires...
La mère de Kanji se doutait bien de tout cela. Elle ne le savait que trop bien, tout comme son pauvre mari, toujours “cloué” contre cette porte. Et elle avait juré à son unique enfant de le laisser reposer dans son lit après cette dernière sortie quatre ans plus tôt. Mais, le fait de le voir illuminé de cette étrange lumière l'incita à briser ce serment. Elle avança péniblement, ralentie par les nombreux courants d'air qui se mirent à balayer la salle. Petit à petit, la distance qui la séparait de son unique progéniture se réduisait... jusqu'à cette énième parole de cette terrifiante voix grave :
- Inutile de vous acharner... Vous ne pouvez lutter contre moi !
Et sur ces mots, madame Rinzō rejoint son mari, contre le mur, paralysée, les bras déployés, assistant impuissante elle aussi à l'expérience la plus horrifiante qui lui ait été donné de voir depuis justement l'annonce de la plus mauvaise nouvelle qui soit : celle où ce mal mystérieux a fait son apparition et lui a dérobé la vie de son enfant, le réduisant à cet état végétatif. Le corps de ce dernier se mut dans un style proche de celui mis en scène par William Friedkin. Il lévita totalement, la couverture étant propulsée hors du lit. Les deux parents ne pouvaient plus rien faire, ni dire quoi que ce soit, ni même penser à la moindre chose. Que diable se passait-il sous leurs yeux apeurés ?
Pendant trois longues minutes, le corps de Kanji est resté à trente centimètres au-dessus de son lit, mais le halo incandescent l'enveloppait toujours. D'étranges chuchotements parvenaient à atteindre les oreilles de ses parents, mais ils étaient tout bonnement incapable de comprendre le moindre mot, comme si cette langue n'avait rien d'humaine. Puis, une fois ces trois minutes passées, le corps du jeune homme finit enfin par retomber sur son lit, faisant au passage craquer une bonne dizaine de lattes. La lumière mauve avait totalement disparu, ramenant l'obscurité dans la chambre.
Les parents de Kanji étaient clairement apeurés devant ce phénomène et n'essayaient même plus de trouver une explication. Ils étaient retombés au sol à l'instant même où le corps de leur fils est retombé sur son matelas. Le mari tentait de protéger son épouse, en larmes. Ils étaient tous les deux à genoux, face à ce lit et leur fils. Était-il mort ? Voilà la question préoccupante qui traversait leur esprit et y installait le doute. Tous deux se relevèrent et avancèrent prudemment jusqu'à arriver à un mètre de ce fameux lit. Que pouvaient-ils percevoir ? Leur enfant unique donnant l'impression de dormir...
- K... Kan... Kanji ? demanda-t-elle.
- Est-ce... est-ce que... tu... tu nous... entends... ?
Tout ce qu'ils espéraient, c'était un simple battement de cil, ce battement qui leur signifierait que leur enfant est encore en vie et qu'il était capable de les écouter. Pourtant, la réponse qu'ils obtinrent fut d'un tout autre niveau, lorsque Kanji ouvrit les yeux.
- Merci pour le corps de votre fils ! J'en prendrai bien soin, dit-il en se redressant.
Inutile de dire que cette réponse eut pour effet de pétrifier les époux qui n'en revenaient pas et qui écarquillaient les yeux. Kanji Rinzō, jeune homme âgé de vingt-deux ans, et atteint d'une maladie mystérieuse et incurable, l'ayant cloué définitivement au lit et lui ayant fait non seulement perdre l'usage de la parole mais aussi de la motricité, vint tout juste de bouger de nouveau la partie supérieure de son corps, ainsi que ses lèvres. Ce qui se déroula sous les yeux de ses parents ne semblait pas du tout n'être qu'une illusion. Est-ce qu'ils étaient bel et bien en train de rêver ou bien un miracle vient d'apparaître sous leurs yeux ébahis ?
La voix provenant de Kanji était identique à celle qui résonnait auparavant, et qui semblait proférer des menaces à l'encontre de ses parents. Le jeune homme quitta son lit et se tint sur ses deux jambes, poursuivant le côté fascinant et miraculeux de ce qui se déroule dans cette petite chambre. Debout, Kanji se mit à faire tous ces mouvements qu'il ne pouvait plus réaliser. Des choses tout à fait triviales : bouger les bras, serrer son poing, tourner la tête, marcher... Tout cela, à présent, il en était de nouveau capable, sous les yeux ébahis et stupéfaits de ses parents qui ne se posaient qu'une seule question : “Comment ?”.
- Je devrais vous remercier d'avoir pris soin de ce corps, sourit Kanji en voulant quitter sa chambre.
Cependant, il fut arrêté par son père qui posa sa main sur son épaule, visiblement le sourire aux lèvres, tout comme son épouse.
- Je suis... si content..., dit-il en essayant de contenir ses émotions.
Kanji tourna légèrement la tête dans sa direction mais l'expression qui pouvait se lire sur son visage était complètement différente de celle de son père. Lui ne souriait plus du tout et ses yeux n'avaient plus cette teinte bleue sombre. Ils luisaient désormais d'un rouge vermeil incroyablement sombre et menaçant. Tout à coup, la main de son père sembla refroidir brusquement, comme si elle était coincée dans un bac à glaçons au Pôle Nord. Il tenta alors de la retirer par réflexe mais il en était de nouveau incapable. Ce fut ensuite à la main de Kanji de se poser sur celle de son père et de la serrer le plus fort possible. Il la broya de toutes ses forces, le faisant hurler de douleur. Aussitôt, sa mère tenta d'intervenir mais, de l'autre main, Kanji la bloqua instantanément.
- Qu'est-ce que tu fabriques, Kanji ? hurla son père.
- Kanji ? Mais qui est-ce ? répondit son fils.
- Mais qu'est-ce que tu racontes ? lui dit sa mère. Tu es notre fils chéri.
- Je ne suis pas celui que vous appelez “Kanji”... Et maintenant, j'ai à faire. Laissez-moi je vous prie.
- Pas si vite !
Visiblement, le père de famille semblait attendre des explications de la part de son fils sur ce qu'il vient de se passer. Ce dernier était au niveau de la porte, immobile, tournant le dos à ses interlocuteurs et soupirait un peu.
- Je n'ai pas de temps à vous consacrer, êtres humains inutiles !
- Qu'est-ce que tu as dit ? demanda sa mère.
- Tant que tu vivras sous notre toit et tant que nous serons tous les deux ici, tu devras nous obéir, même si tu as la majorité...
Cette menace, lancée par un homme qui commençait à angoisser et dont quelques gouttes de sueur apparurent, n'eut pour conséquence que de faire rire Kanji. Ce rire était si terrifiant qu'il glaça le sang de ses parents, ne comprenant plus rien à la situation. Ce rire était digne d'un diable et tout à coup, la température dans la chambre devint de plus en plus bouillante. Kanji prit le temps de se retourner et dit alors :
- Tu as sans doute raison, vieil homme...
Les parents de Kanji froncèrent les sourcils en voyant cette attitude complètement désinvolte de leur fils, qui était encore alité il y a quelques minutes. Ils firent face à ce jeune homme qui s'apprêtait pourtant à quitter sa chambre. Ce dernier n'eut nullement l'air inquiet devant ces menaces qu'il prenait plus qu'à la légère. Ses parents le virent bouger la main gauche et ce fut l'ultime geste que leurs yeux purent capter avant de se fermer pour l'éternité.
- ...mais tant que vous étiez vivants..., termina le jeune homme.
Face à lui, les corps de ses parents, étendus sur le sol, aussi pâle qu'un fantôme, sans vie. Aucune marque de coup ni de blessure, rien qui ne pourrait laisser penser à une agression physique. Monsieur et madame Rinzō ont quitté cette vie, par la main démoniaque de leur fils, Kanji. Ce dernier éclata d'un rire sardonique et d'un autre geste de la main, fit disparaître les cadavres de ses victimes.
- Kanji Rinzō n'existe plus.
Il se saisit ensuite de son Disque de Duel et jeta un coup d'œil aux cartes qui s'y trouvaient et cela semblait lui convenir. Avec sa main, fit changer de nouveau d'un simple geste le nom qui était affiché sur l'étiquette. De Kanji Rinzō, il ne restait plus que cette nouvelle identité de... Keiji Ikeda. Voici le nom auquel il allait désormais répondre lorsqu'on s'adresserait à lui. Ensuite, il se dirigea vers la petite salle de bain et se regarda dans le miroir.
- Ce corps me semble parfait..., dit-il en souriant.
Face à lui se tenait un gaillard souriant mesurant un mètre quatre-vingt-dix, avec des yeux bleus sombres et des cheveux bruns très courts. Physiquement, ce n'était pas quelqu'un donnant l'impression d'être très costaud. Les quinze années passées dans ce lit l'ont rendu plutôt maigre, même s'il pèse aux alentours de 80 kg. Un nez pointu, deux oreilles presque collées au crâne, un menton très fin et très légèrement allongé complétaient ce visage qui semblait lui convenir. Il se passa de l'eau sur le visage et dit d'une voix toujours aussi grave :
- Nous partagerons ce corps... ne t'en fais pas.
Avant de quitter la chambre, son Disque de Duel dans un sac à dos, ainsi que quelques vêtements, il remarqua la présence de ce magazine traînant sur la table de chevet. Attiré par sa curiosité, il y jeta un œil et remarqua que la couverture représentait une personne du nom de Dan Lotyuwi, et qu'elle mentionnait la victoire contre les Démons.
- Toi !!!
Sur ce simple mot, celui qui s'était renommé Keiji déchira ce magazine et en fit des confettis qu'il dispersa d'un mouvement de bras à travers la fenêtre. Puis, il sortit de cette chambre et ramassa quelques bricoles, nourriture, argent, vêtements avant de sortir de la maison en murmurant ces quelques mots : “Le corps est mortel mais l'âme est immortelle... Tôt ou tard, je te retrouverai... Dan Lotyuwi.”
Au même moment, à plusieurs centaines de kilomètres d'ici, dans la ville d'Akinokuwa, Dan Lotyuwi se réveillait en sueur à la suite d'un cauchemar.
- Bloody Maiden
- Messages : 1078
Age : 25
Re: Le Réveil des Démons
Ven 24 Mai - 14:44
Chapitre 01 - Deux années se sont écoulées... [partie 1 parce que le chapitre est si long que j'ai besoin de deux posts]
- Spoiler:
- Septembre 2018, Akinokuwa. La ville paraissait incroyablement normale. La vie battait son plein. Les affaires économiques se passaient bien. Un calme royal régnait sur toute la préfecture et le moins que l'on puisse dire, c'est que les habitants ne s'en plaignaient nullement. Les différents quartiers étaient rudement tranquilles, ce qui facilitait le travail des forces de l'ordre là où le besoin s'en ressentait. Pour les habitants d'Akinokuwa, cette tranquillité, c'était la chose la plus importante qu'ils possédaient. Encore plus importante, encore plus précieuse, encore plus envieuse que tout l'or du monde. S'il fallait trouver une explication à tout cela, elle se situerait à deux endroits précis. Le premier était la place de la mairie, auréolée d'une grande statue de bronze.
Il s'agissait en réalité une œuvre allégorique, illustrant la dichotomie en place dans ce monde, du moins, lors de ce qui a pu se produire il y a deux ans de cela. Un ange aux ailes déployées, protégeant deux enfants, terrassant un démon à cornes de son épée. L'expression affichée sur ce démon, ressentant une certaine terreur, glaçant le sang des plus peureux, victime d'un châtiment céleste, marquait l'effroi qu'il a pu causer sur cette bonne ville d'Akinokuwa. L'ange, aux antipodes de sa victime infernale, ne laissait échapper que bonté, courage, bravoure, tendresse et justice. Une phrase y était gravée en kanjis et en anglais :
EN MÉMOIRE DES COMBATTANTS VICTIMES DE LA BARBARIE DÉMONIAQUE.
LE MONDE VOUS HONORERA À JAMAIS POUR AVOIR LUTTÉ JUSQU'AU BOUT.
QUE CHAQUE PERSONNE PUISSE REPOSER EN PAIX.
Voilà ce qui était visible, en lettres d'or, sur ce grand socle de cette statue, culminant à près de quatre mètres et demi de haut pour trois de large. Elle fut inaugurée un an jour pour jour après cette affreuse tragédie qui secoua le monde mais surtout Akinokuwa. Et elle était liée à cet autre symbole qui se trouvait gravé sur les murs du grand Stade de l'Aurore. Sur les colonnes extérieures étaient gravées les noms de celles et ceux dont la vie fût lâchement ôtée lors de cette triste guerre. Tant de noms d'individus étant tombés au combat ou collatérales étaient inscrites pour l'éternité. Pendant des semaines, des graveurs s'attelaient à cette tâche, que certains jugeaient inutiles, mais que d'autres approuvaient car ce tribut était tout simplement inévitable tellement l'intensité des combats fut importante. Plus d'un millier de noms furent ainsi taillés dans l'acier des colonnes entourant cette grande enceinte. Beaucoup de ces individus étaient connus de la population de la ville et c'est ce qui rendaient ses habitants particulièrement mélancoliques à ce sujet. Et depuis, des bouquets de fleurs et autres offrandes parsemaient le Stade, en mémoire de ces pauvres victimes.
Mais la ville n'avait pas oublié ceux qui avaient survécu mais qui ont quand même sacrifié leur intégrité physique et mentale. Ceux-ci étaient aidés financièrement, initiative soutenue par l'État lui-même. Ainsi, un grand nombre de personnes ont bénéficié de primes, d'avantages sociaux, de quelques “privilèges”, dans l'optique de combattre l'inégalité de leur situation. Les familles des victimes étaient également soutenues. Mais tout l'argent que pouvait offrir une administration à une famille ne pouvait pas combler le creux crée par la Faucheuse lorsqu'elle s'est vicieusement amusée à moissonner la population humaine à travers les actes inhumains des Démons. Les larmes des parents perdant leurs enfants dans cette affreuse guerre mettaient longtemps avant de sécher et les cicatrices causées étaient difficilement refermables. Bon nombre d'associations s'étaient ainsi développées pour aider ceux qui en souffraient le plus
Par ailleurs, parmi les défenseurs de cette mémoire liée à la guerre se trouvait celui qui eut l'idée de proposer l'inscription des noms sur les colonnes du Stade de l'Aurore. Cette personne répondait au nom de Dan Lotyuwi, celui-là même qui battit le Démon Nephomet dans un Duel à plus de cinq cents mètres d'altitude. Celui qui n'était âgé que de dix-huit ans, devenu orphelin de ses parents à l'âge de trois ans, élevé par sa marraine, décédée également de la main de ce Nephomet, a bien grandi depuis cette guerre. Lui aussi, tout comme ses concitoyens d'Akinokuwa, appréciait cette paix revenue dans sa ville. C'était l'une des choses qu'il pouvait apprécier à sa juste valeur. Depuis la fin de cette guerre, il ne se passait pas un jour sans qu'il ne prit le temps de siroter une tasse de thé sur la terrasse du 26, Kamen Street, dont il est pleinement propriétaire, à lire le journal et à répondre au courrier dans sa boîte aux lettres depuis ce jour.
Qui pouvait bien lui écrire ces lettres ? Des fans de tous âges, des individus qui le remerciaient pour avoir battu ce Démon menaçant l'humanité. Cela pouvait aller de la simple petite fille de cinq ans fan de Duel faisant une demande en mariage mal orthographiée, à l'adulte qui faisait une simple lettre de remerciement. Il prenait le temps de lire chacune d'entre elles depuis qu'elles ont commencé à affluer. Il y avait plein de dessins qui le représentait lui et ses amis, d'autres où il y avait des conseils pour des Decks à optimiser. Non seulement il avait sauvé le monde – du moins, “pas tout seul”, comme il insistait pour le rappelait, parce qu'il ne veut pas recevoir les lauriers de la victoire – mais il était aussi devenu un champion en Duel. La preuve réside sur la grande armoire qui se trouve dans la salle de séjour. En plus des cinq trophées du Golden Tournament remportés par Yusuke, Akiyo, Shizuka et M.Kanowski, il y en avait aussi trois, gagnés par cette équipe qui trustait désormais les sommets de la discipline. Le premier avait été remporté avant que cette guerre ne chamboule le monde. Puis, les deux dernières éditions ont été également remportées par cette même équipe, composée, en plus de Dan, de Warren Fuzenki et des jumeaux Nejma et Veneko Kunoka.
Oui, cette équipe est restée identique lors de ses participations au tournoi, ce qui est un fait rare car, mis à part l'équipe des parents de Dan, ce qui remportaient ce prestigieux tournoi à de nombreuses reprises n'étaient pas forcément entourés des mêmes partenaires. De plus, l'équipe est triple tenante du titre, ce qui n'est arrivé que deux fois auparavant. Rares sont celles qui réussissent à conserver leur trophée plus d'une fois. Et c'est bien là l'un des objectifs de cette équipe : devenir la première à remporter six tournois consécutifs. “La tâche s'annoncera sans doute très complexe mais on en est capable”, disait Warren à l'issue de la troisième finale remportée, qui avait vraiment hâte d'arriver à l'édition 2019.
Warren… Ce jeune homme aux cheveux blonds et courts aura vécu une drôle d'histoire depuis trois ans. Avant, il estimait être totalement perdu dans sa propre vie. Il avait avoué jouer les durs dans la cour du lycée, brutalisant la moindre personne, uniquement pour essayer de se montrer fort psychologiquement. Trois déclics changèrent brusquement sa vie : une défaite en Duel contre Dan, le fait de s'être fait de vrais amis, et l'épisode dans son ancienne maison. Ce fut à partir de cet instant, lorsqu'il vit les flammes dévorer ce taudis dans lequel il avait vécu, ces flammes qui, en passant, se chargeaient d'expédier son démon de père dans un endroit où il serait châtié en permanence ; cet instant où il se devait de se reprendre en main. À présent que Eyazon n'était plus, il pouvait enfin vivre librement. Et c'est ce qu'il a pu faire, vivant au 26, Kamen Street, en compagnie de Dan et Mina, devenant quelqu'un de respecté et d'apprécié. Non… il n'y avait plus rien qui pouvait lui être reproché. Il avait été pardonné par le monde pour ce qu'il a pu commettre.
À présent, Warren se destinait à faire quelque chose de constructif. Il s'était repris en main dans ses études, passant de fumiste et parasite à un élève travailleur, un workaholic qui avait quand même pris conscience de l'importance du mot “détente”. Il se démenait comme un forcené par moment, même si parfois, cela ne payait pas. Mais en tout cas, il se sentait mieux à l'intérieur de lui-même une fois cette guerre terminée. Il profitait souvent de cette vie tranquille qu'il a enfin découvert, un livre à la main et une cigarette aux lèvres.
La cigarette… bien évidemment, c'était quelque chose que Mina n'appréciait pas du tout. Elle ne s'en était pas du tout cachée. Le jour où elle en vit un paquet dans la maison, elle avait été particulièrement incontrôlable, s'étant notamment mise à hurler au visage de Warren, totalement désabusé. Il avait fallu une intervention de Dan, qui a trouvé un compromis tout à fait acceptable : Warren pouvait fumer au 26, Kamen Street, mais uniquement dehors. La réaction furieuse de Mina avait grandement troublé le jeune homme mais cela ne l'empêchait pas le moindre du monde de consommer régulièrement ces “allumettes toxiques” comme le disait si bien Mina, au rythme d'une par jour.
D'ailleurs, il s'était découvert un talent surprenant en ce qui concerne le journalisme, s'étant inscrit à l'université en journalisme. Lors de sa dernière année au lycée, une fois délivré de ces sombres événements, il avait tenté sa chance au sein du club de journalisme amateur. D'ailleurs, il était légèrement angoissé à l'idée d'y aller pour la deuxième fois. La première fois s'était soldée par une exclusion d'une semaine étant donné qu'il avait tabassé les deux rédacteurs et racketté les autres membres. La raison était “absolument puérile”, disait-il en présentant ses excuses les plus solennelles. Et, au fil des semaines, il commençait à développer une petite plume, de quoi lui assurer un petit succès qui suffisait amplement à son bonheur. Il écrivait des articles avec une parfaite objectivité. Il dit “être incroyablement fier de tout le travail qu'il a dû faire sur lui” pour tout cela. Petit à petit, il avait de plus en plus d'aisance à l'écrit, chose qu'il aurait trouvé complètement inutile et stupide il y a quatre ans. Et, sur un parfait coup de tête, il s'était inscrit en journalisme après la fin du lycée. Malgré son dossier scolaire pour le moins calamiteux, il avait réussi les examens d'entrée avec brio, bien qu'il était cruellement intenable, transpirant à grosses gouttes la semaine précédente.
En tout cas, Warren se sentait heureux. Toute cette vie malfaisante était désormais derrière lui, enterrée six pieds sous terre. Il allait enfin de l'avant et c'était le plus important pour lui. Et s'il y avait une chose à laquelle il devait tout cela, c'était évidemment les conseils et l'attention de ses amis. Cela sonne un peu comme une fairy tale mais c'était la pure vérité. À la fin de cette guerre, il avait exprimé le souhait de changer de vie, de repartir à zéro, ce qu'il fit effectivement. Et ni rien ni personne ne pouvait le lui reprocher.
S'il y a quelqu'un qui s'est révélée être très importante dans le renouveau de Warren Fuzenki, c'était bel et bien Mina Mizunori. Elle aussi a vécu son lot d'événements traumatisants pendant cette guerre. Elle en gardera toujours une légère balafre au cou, causée par la poigne de cet ancien et mauvais Warren, qui avait pris un malin plaisir à l'étrangler lorsqu'elle était retenue prisonnière. Mais c'était surtout la corde qui lui avait été administrée, dans le but de la voir faire le grand saut vers l'au-delà. Ce moment précis où ses pieds quittaient la planche du salut par la force pour se retrouver à une dizaine de mètres au-dessus du vide. Tout cela la hantera jusqu'à la fin de ses jours, même si tout cela s'est bien terminé.
Mina avait changé lors de ces deux dernières années. Bien plus forte psychologiquement, moins frêle, elle avait beaucoup évolué et n'était alors plus du genre à se cacher derrière quelqu'un d'autre. Elle avait gagné en assurance et elle le devait beaucoup à Dan. Mais qu'a-t-elle fait pour Warren ? Tout simplement : elle l'a aidé à se réinventer à la suite de la guerre. Elle a passé des heures à l'aider à se sentir mieux, l'aidant notamment en cours. Au lycée, les élèves et même les enseignants paraissaient complètement stupéfaits en voyant Warren agir un peu comme un zombie, devenu incroyablement plus calme. Bien sûr, cela avait commencé une fois qu'il avait perdu son tout premier Duel au lycée, contre Dan. Il se comportait calmement… mais une fois la guerre passée, il paraissait plus épanoui. Et c'était grâce aux conseils psychologiques de Mina. C'était d'ailleurs ce qu'elle voulait faire de sa vie.
Physiquement, elle n'avait pas beaucoup changé. Elle avait toujours sa “belle crinière brune” comme le disait si bien Dan. Ceux-ci tombaient jusqu'au milieu de la colonne vertébrale et étaient toujours aussi ondulés, ce qui fascinait Dan lorsqu'il y passait délicatement sa main. Ses yeux verts sombres étaient “des émeraudes que l'on pourrait contempler aussi longtemps que le temps nous le permettrait”, toujours selon les mots de Dan. Les changements qu'elle avait subi étaient bien évidemment du côté mental. À vingt ans passés, Mina vivait pleinement sa vie et ni rien, ni personne n'avait eu l'idée de la perturber. Vivant toujours à Kamen Street, aux côtés de son fiancé, Dan Lotyuwi, elle était incroyablement heureuse.
En effet, ils n'avaient à se soucier que de peu de choses. Qu'il soit question de leur bien-être, de leur compte en banque ou bien de leur vie conjugale, on pouvait très clairement affirmer que tous les voyants étaient au vert. À la mort de Shizuka, Dan avait hérité de la somptueuse maison dans laquelle ils vivaient – puisque la gouvernante en était l'héritière si quelque chose venait à se produire pour Yusuke et Akiyo avant la majorité de Dan –. Le cabinet d'ingénierie appartenant à Yusuke Lotyuwi fut vendu quelques mois après la fin de la guerre, Dan ne se sentant pas intéressé par cela. Il fut vendu à la condition que chaque personne employée conserve son emploi, condition respectée par le repreneur. Non… ils n'avaient aucun problème d'argent, Mina venant également d'une famille aisée. D'ailleurs, ses parents ne vivent plus dans la maison qui se trouvait en face. Ils avaient déménagé en direction de Kyoto. Mina comprenait cette décision et la volonté de ses parents de lui offrir une certaine autonomie.
On alimenterait toujours le côté fairy tale en avançant tous ces éléments mais c'était exactement ce que Dan et Mina avaient imaginé. Après cette guerre, tout ce dont ils voulaient, c'était vivre en paix, sans le moindre événement remuant toute la ville, mis à part les deux mois de Golden Tournament. Mina appréciait ce tournoi parce que cela lui permettait d'aider ses amis à gérer la pression. Il ne fallait pas croire que, juste parce qu'ils avaient remporté le tournoi une première année que les autres trophées allaient tomber dans leur escarcelle d'un simple claquement de doigts. Chaque nouvelle édition apportait son lot de nouveautés, de surprises et d'émotions. L'année précédente et à trois reprises lors des trois premiers tours, l'équipe a frôlé la défaite sur la deuxième manche après avoir concédé la première. Par la suite, la fin de ce tournoi s'est relativement bien passée. Quant à l'édition de cette année 2018, l'équipe menée par Dan a eu énormément de mal à se hisser jusqu'en finale. Cependant, il y a une chose à noter : aucune des manches concédées par l'équipe ne l'a été par Dan. Oui… il n'a encore jamais connu la défaite en Duel, ce qui fait que Dan est vraiment adulé par les fans.
Les deux derniers membres de l'équipe, Nejma et Veneko Kunoka, ont aussi connu leur lot d'évolutions après cette guerre. Bien qu'ils soient toujours au lycée, en dernière année toutefois, leur vie a quelque peu changé depuis. Eux n'habitaient pas du tout au 26, Kamen Street, au contraire de Warren, mais toujours chez leurs parents. Cependant, Nejma éprouvait de moins en moins le bonheur à vivre sous le toit de ses parents, dans cette même maison où elle et son frère s'étaient battus contre les Démons Dilvolg et Andralon. Cet épisode n'a laissé que de la tristesse et de l'amertume dans l'esprit de Nejma. Ce qui l'énervait beaucoup, c'était le fait que ses parents aient été contrôlés par ces perfides démons. Et quand bien même elle se soit réconciliée avec Yoshinobu et Kaori Kunoka, elle allait même jusqu'à éprouver une certaine haine envers eux. Elle ne leur adressait que rarement la parole. C'était tout le contraire pour son frère, qui paraissait plus sympathique vis-à-vis de ses géniteurs. Voilà pourquoi ils passaient une grande partie de leur temps libre chez Dan, dans l'optique de bien terminer leurs années de lycée, ainsi que leur préparation au tournoi d'Akinokuwa.
Toutefois, il n'y avait pas que le Duel de monstres qui occupait l'esprit de ces cinq jeunes, et plus particulièrement Dan. Mis à part ses études et Mina, Dan passait le plus clair de son temps à se livrer aux joies des arts martiaux. Il s'entraînait deux heures par jour depuis qu'il a quitté ses béquilles à la suite de son Duel contre Nephomet. Même s'il en maîtrise vingt-deux, il fallait qu'il retrouve une activité physique régulière. Et c'était quelque chose qu'il appréciait énormément. Bien que Shizuka ne soit plus là pour l'entraîner, il était vraiment heureux quand il pouvait travailler chaque mouvement appris. Un de ses rêves tout petit était de s'inscrire pour une compétition internationale ou olympique. Et parfois, il arrivait que ses entraînements se fassent en compagnie d'autres personnes. “Plus on est de fous, plus on rit”… cet adage faisait sourire Dan, lorsqu'il s'entraînait en compagnie de Nejma et de Mina. Bien évidemment, pour ces deux dernières, cela prenait la forme d'une initiation, étant donné qu'elles n'avaient quasiment aucune expérience en la matière. De plus, une autre personne venait également accompagner les trois personnes : Alicia Saint-John.
Celle-ci était devenue une grande amie du couple Lotyuwi-Mizunori et appréciait aussi cette initiation au combat à mains nues. Tout cela remontait à cette expédition en Endlenda. Alicia désirait beaucoup apprendre quelques techniques auprès de Dan, qu'elle continuait à considérer comme son idole. Elle adorait passer chez Dan pour prendre le thé en fin d'après-midi et elle continuait son apprentissage. Elle avait même accepté, quelques semaines après la fin de la guerre, d'accueillir dans son hôtel les enfants orphelins que Dan et Warren avaient trouvés dans un bâtiment désaffecté deux ans plus tôt. Tous venaient en compagnie d'Alicia chez Dan tous les jours, au plus grand bonheur de ce dernier et de Mina, qu'ils adoraient énormément. La raison pour laquelle elle avait décidé d'accueillir ces enfants était de soulager un peu les responsabilités de Dan et de Mina juste après la guerre. Le jeune homme était complètement à bout physiquement au sortir de ces sombres événements. Depuis, elle est même devenue la tutrice légale de ces dix petits bambins et tous la considéraient comme une “super-maman”.
Pendant ce temps, Dan a pu débuter un des rêves qui lui tenait à cœur. Et cela a débuté à la fin de l'année 2016. Il venait de se fiancer avec Mina et attaquait sa dernière année au lycée et une idée commençait à germer dans son esprit. Il s'était mis en tête de créer un dojo d'arts martiaux. Il en avait eu l'idée un jour où il s'entraînait en compagnie de Mina, à qui il en a parlé. Interrompant sa séance de taï-chi-chuan, il expliqua alors les différents arguments qui l'ont poussé à s'imaginer propriétaire d'un dojo. Tout cela lui venait sans qu'il eut besoin de le noter au préalable. Puis, une fois cet argumentaire terminé, la réponse de Mina eut comme conséquence un magnifique sourire radieux sur le visage de son fiancé. “Je veux bien que tu réalises ton rêve mais tu ne fais pas ça chez nous”, avait-elle dit une fois avoir entendu cela. Et Dan a alors choisi un emplacement dans le centre-ville, proche de chez lui, et passait le plus clair de son temps libre, ainsi que l'année scolaire, à travailler dans le but de faire de cette salle un dojo. Il recevait très régulièrement un coup de main de la part de ses amis.
L'année dernière, un jour où Dan était en train de peindre les murs, quelqu'un vint le voir. Cette personne se déchaussa et ce simple bruit suffit à attirer l'attention de Dan, qui sut aussitôt qui venait lui rendre visite. Pourtant, il y avait un poste de radio allumé couvrant la plupart des bruits à l'intérieur. Dan l'éteignit et lui dit alors :
- Je ne m'attendais pas à vous voir ici, Reizo. C'est pour m'aider à peindre ?
Dan avait un rouleau dans les mains et trois pots de peinture aux pieds de l'escabeau sur lequel il était monté. Le sol était recouvert de papier journal et le jeune homme s'attaquait aux murs avant de s'occuper du sol. Son interlocuteur était un homme d'une cinquantaine d'années, chauve, barbu et portant un jean plutôt ample, de couleur beige, et un par-dessus noir. On avait beau être en octobre mais cet homme ne ressentait pas le froid qui gagnait progressivement la ville.
- Je suppose que tu avais prévu ma visite, dit ce dernier en saluant son jeune ami.
- À vrai dire, Mina, Warren et les jumeaux sont encore en cours. Alicia est à Osaka pour un rendez-vous d'affaires, et mon arrière-grand-père vient me voir d'Okinawa dans trois semaines. Du coup, le nombre de possibilités est réduit.
- Toujours à manquer l'école à ce que je vois… ce n'est pas forcément raisonnable. Tu ferais mieux de laisser des professionnels se charger d'aménager cet intérieur.
Dan reposa le rouleau et descendit de l'escabeau. Il portait une tenue d'ouvrier d'usine bleue. Du moins, elle l'était avant d'être tachetée de blanc sur toute la partie inférieure. Il essuya ses mains avec un chiffon et salua son interlocuteur.
- Dans combien de temps penses-tu ouvrir cette école ?
- Voyons voir…, répondit Dan, je pense que d'ici septembre prochain, tout sera terminé. Et pour reprendre la question d'avant, je veux faire tout ça sans faire appel à des entreprises. Il y a encore quelques pans de la ville qui n'ont toujours pas récupéré leur splendeur plus d'un an après la fin de ces combats. Et il y a une autre raison qui me tient plus à cœur.
- Laquelle ?
- Eh bien… c'était quelque chose qui me trottait dans la tête lorsque j'ai réfléchi à ce projet, dit le jeune homme en s'asseyant sur une chaise, imité ensuite par Reizo. J'ai eu envie d'insuffler une certaine âme dans ce dojo.
- Une certaine âme ? Comment ça ?
- Cela peut paraître complètement stupide, mais je pense que, lorsqu'on veut enseigner quelque chose, on se doit de le faire dans un cadre qui sera à la fois agréable pour l'élève et le professeur. Construire une atmosphère qui pousse l'élève à la fois se détendre, apprendre et travailler du mieux qu'il le peut, c'est avant tout ce que je recherche. Et voilà pourquoi je suis en train de peindre ces murs moi-même. C'est un peu comme si je veux faire en sorte que chacun se sente comme chez soi.
- C'est donc pour ça que tu m'avais demandé de te faire visiter mon monastère ?
Dan acquiesça. En effet, la semaine suivant sa décision de vouloir construire son propre dojo, Dan avait contacté Reizo Matsuda, non seulement un grand Duelliste, mais aussi un farouche combattant pendant la guerre et un ami de confiance, pour visiter son monastère, où il enseigne à la fois le Duel de monstre mais aussi le sport de combat ; ce dernier étant ceinture blanche-rouge de judo huitième dan. Ce monastère se trouvait à une quarantaine de kilomètres du centre-ville d'Akinokuwa et était très réputé, accueillant jusqu'à deux cents élèves. Et les élèves de ce dojo devaient prouver leur valeur en participant à des compétitions, du moins les plus aguerris d'entre eux. Reizo s'était d'ailleurs retrouvé une seconde fois face à l'équipe de Dan, cette fois-là en demi-finale, la première étant lors des quarts.
- Tu as raison, dit Reizo. Je dois avouer que l'intérieur de certaines salles de mon monastère ne sont pas forcément très accueillantes aux premiers abords et que je devrais songer à les rendre plus attrayantes. Mais je partage ton point de vue.
- En réalisant le travail d'intérieur moi-même, où du moins, en partie, je m'assure le fait que ma salle d'entraînement sera en accord avec ce que je veux transmettre.
- Et sur quelles disciplines tu penses t'orienter ?
- J'ai rempli tous les formulaires nécessaires pour obtenir cet endroit et pour pouvoir enseigner. Après, je n'ai pas encore réfléchi sur ce que j'allais enseigner. Ce sera sans doute mixte au début. Peut-être que je vais diversifier mon offre ou bien la réduire selon la demande…
- Tu parles comme un vrai homme d'affaires, sourit le moine.
- J'imagine que vous étiez d'abord venu me demander une nouvelle fois si je voulais intégrer votre établissement, de surcroît très réputé.
- Je ne peux vraiment rien te cacher. J'y avais longuement songé après ta première visite mais l'idée m'était venue lors de notre premier Duel pendant le tournoi. Tu m'avais fait forte impression et je m'étais interrogé sur cette question. Mais…
- …j'ai refusé, dit Dan en s'étirant l'épaule.
- Le refus ne m'avait pas forcément abattu. Ce qui me dérangeait le plus, c'était que si j'avais réussi à faire de toi un de mes disciples, j'aurais vite été à cours d'enseignements. Je pense que Dame Shizuka a fait un remarquable travail avec toi et que, par conséquent, un autre sensei te serait un peu inutile.
- C'est aussi une des raisons qui m'ont poussé à refuser cette offre, avoua le jeune homme.
- En tout cas, je pense que tu feras un excellent professeur et que ton rêve se réalisera avec les meilleurs auspices. Et si jamais tu as besoin de moi pour un cours, je serai ravi de t'apporter mon aide.
- Je n'y manquerai pas.
Les deux personnes se relevèrent et s'inclinèrent à la manière de judokas avant d'entrer dans l'aire de combat. Dan raccompagna ensuite Reizo et se remit à l'ouvrage.
Le temps passait et petit à petit, les travaux finirent par s'achever. La salle d'entraînement était pratiquement terminée, les peintures faites, les parquets et tatamis posés, les vestiaires, la décoration intérieure, la devanture, les flyers… le jour de l'ouverture allait bientôt arriver et Dan trépignait d'impatience à l'idée de donner ses premiers cours. Un tel entrain faisait également sourire Mina, qui pensait enfin que son Dan mettrait de nouveau les pieds dans un établissement scolaire. Pourtant, un mois auparavant, Dan était en train de faire le carrelage des sanitaires et le moins que l'on puisse dire, c'est que Warren, venu l'aider en ne sachant pas du tout faire ce genre d'activité, n'avait jamais entendu autant de jurons sortir de la bouche de son ami. C'est bien l'une des deux fois où Dan a été contraint de faire appel à un professionnel, en l'occurrence, un de ceux qui s'était occupé des toilettes de l'hôtel Saint-John, celles-là même que Dan avait pulvérisé quelques heures avant son Duel contre Warren dans l'ancien hôpital militaire, sous le coup d'un vif et intense accès de colère. La seconde fois où Dan dût faire appel à quelqu'un d'autre pour son dojo, c'était évidemment pour la plomberie et l'électricité.
Mina se réjouissait du bonheur que pouvait ressentir Dan à l'idée d'avoir un endroit où il peut partager ses connaissances dans le domaine des arts martiaux. Pourtant, elle était un peu déçue de voir que Dan semblait se moquer totalement du monde scolaire, même si ce n'était pas quelque chose qui lui était inconnu. Avant les événements de 2016, Mina avait pour habitude de s'occuper des cours pour Dan lorsque l'envie lui prenait de rester chez lui. Certes, il y avait Shizuka pour remplacer le corps enseignant mais là, après la guerre, tout était différent.
- Tu ne veux vraiment pas revenir en cours ? disait Mina au moins une fois tous les quinze jours.
- Je n'ai jamais été quelqu'un de scolaire, répondait alors son fiancé. Une fois de temps en temps, je dirais “pourquoi pas ?”, mais là… cette routine ne me convient pas.
- Tu as pourtant les compétences largement suffisantes pour pouvoir atteindre les sommets. N'est-ce pas une motivation pour toi, qui veut toujours les atteindre ?
- Si je viens en cours, je ne pourrais pas m'empêcher de piquer un somme ou bien remplacer le prof, répondit-il avec un léger rire.
Alors évidemment, cela pouvait ennuyer Mina, au point de la rendre triste, mais elle a continué à s'occuper de la vie du lycée comme elle pouvait. Et comme promis, de temps en temps, Dan venait faire acte de présence, de son plein gré ou bien sous le coup d'un chantage de la part de celle qui partageait sa vie. Warren se souvient du seau d'eau mélangé à un bac à glaçons déversé sur un Dan encore profondément endormi. Comme deux enfants qui se chamailleraient, Dan a bondi du lit comme un diable en boîte et a poursuivi Mina dans toute la maison, le tout sous les yeux d'un Warren complètement dans les vapes. À noter que cette course-poursuite s'est terminé avec des éclats de rire de la part de Mina qui reçut un seau d'eau à son tour. La pauvre était habillée et prête à se rendre en cours, ce qui fit exploser de rire ce dernier.
À présent, tous trois étaient dans leur première année universitaire et le moins que l'on puisse dire, c'est que les mots “Dan” et “assiduité” n'étaient pas vraiment complémentaires. Ce dernier ne savait pas quoi prendre et s'est orienté dans des études plutôt littéraires, tout comme Mina et Warren ; respectivement en psychologie et en journalisme. Beaucoup de gens ne comprenaient pas pourquoi Dan s'était inscrit, alors que ses résultats aux concours d'entrée étaient tout simplement les meilleurs. De plus, son dossier était tout à fait excellent, même si son absentéisme était le seul élément qui pouvait représenter une menace. “Après tout, c'est à eux de choisir…”, disait-il.
Voilà ce qu'on pouvait dire sur ces deux dernière années à Akinokuwa du côté du 26, Kamen Street. La vie a retrouvé son calme après cette guerre, c'est la conclusion la plus évidente qui se dégageait de ce bilan s'étendant sur près de vingt-quatre mois. En ce mois de septembre 2018, tout le monde se préparait au second semestre. Auparavant, le lycée fonctionnait sur le modèle occidental, étant donné qu'il s'agissait d'un choix de la ville. Mais, à la suite de cette guerre, qui eut lieu en juillet et les dégâts occasionnés, la ville a changé le fonctionnement scolaire. C'était une véritable curiosité qui a été réparée et, une singularité propre à Akinokuwa. Pourtant, entre la dernière année de lycée et la première d'université, il y avait pourtant un laps de temps assez conséquent, permettant aux futurs étudiants de se préparer en vue des études supérieures. À cause de cette guerre, qui a ravagé ce lycée, l'année scolaire suivante fut repoussée et définitivement calée sur le modèle japonais. Enfin bref…
Au carrefour qui menait sur Kamen Street, tandis que le jour commençait à décroître, une ombre apparut au niveau du panneau qui indiquait le nom de cette route. On pouvait y voir une jupe plissée s'agiter avec une petite brise de tout début d'automne. De dos, cette femme regardait la rue et la maison numérotée 26. Elle avait une cigarette dans la bouche et tirait une latte. Elle laissait échapper des volutes de fumée tout en posant ses yeux cachés par des lunettes de soleil, étant donné que le soleil éblouissait une partie de son visage.
- Quatre ans passées avant de te revoir, mon cher Dan, murmura-t-elle en laissant tomber sa cigarette.
D'un coup de talon sec, elle écrasa le mégot encore rougeoyant et se saisit de son téléphone portable qui se trouvait dans son sac à main. C'est alors qu'elle fit demi-tour, en direction du centre-ville, tout en envoyant un message à l'un de ses contacts. Pendant qu'elle marchait, ses doigts tapotaient à toute vitesse sur le clavier virtuel du smartphone et on pouvait ainsi lire : “J'ai retrouvé sa maison”. Et moins de trente secondes plus tard, elle obtint une réponse : “Laissons-le encore quelques jours tranquille. Il sera très certainement chamboulé en nous revoyant”. Un simple “OK” suffit et cette mystérieuse femme continuait sa petite marche à pied sur les trottoirs d'Akinokuwa.
- Bloody Maiden
- Messages : 1078
Age : 25
Re: Le Réveil des Démons
Ven 24 Mai - 14:45
Chapitre 01 - Deux années se sont écoulées... [partie 2]
- Spoiler:
- Le lundi matin, le 1er du mois d'octobre, au 26, Kamen Street, le réveil sonnait dans la maison, à six heures et demie. Warren se réveilla presque instinctivement, quoique complètement paniqué. Sa nuit fut brève étant donné qu'il a relu ses cours et a parcouru quelques ouvrages de théorie littéraire. Il était assis sur une chaise et dormait sur ses bouquins. Lorsqu'il entendit son réveil, il tomba à la renverse et se précipita à l'étage supérieur pour prendre une douche. De rares rayons de soleil parvenaient à s'infiltrer dans sa chambre, où les volets n'étaient pas fermés. Tout ce qu'il fit en grimpant l'escalier, c'était soupirer. Le lundi n'était pas sa journée préférée, comme pour beaucoup de monde.
- Tu as une mine affreuse, Warren, lui dit une voix féminine lorsqu'il redescendit pour prendre son petit-déjeuner.
- Tu n'as pas idée à quel point le cours d'anglais du tout début de semaine est affreux et répulsif.
Mina se trouvait déjà dans la cuisine, préparant la table pour le petit-déjeuner. Elle avait l'air particulièrement en forme, comme à son habitude. C'était bien la seule à être du matin et à ne pas se coucher à des horaires plus que tardifs. Le café était fumant dans la tasse de Warren, qui prit de la confiture d'orange, qu'il étala sur une tranche de pain beurrée. Il continuait à soupirer, ce qui attira évidemment l'attention de Mina.
- Tu devrais sans doute songer à dormir un peu plus.
- J'aimerais beaucoup, j'aimerais beaucoup… , souriait-il en buvant trois gorgées de café. Mais le journalisme et en particulier l'écriture nécessite beaucoup de travail.
- Ça se comprend mais fais attention quand même.
- Il n'est toujours pas levé ?
Warren esquivait une nouvelle fois la question de sa santé en changeant de sujet. Là, il fit un signe de tête en direction de la troisième chaise autour de la petite table. Cette chaise, inoccupée, était celle de la troisième personne qui vivait ici, et non des moindres puisqu'il s'agissait du maître de maison. Warren n'attendait pas de réponse de la part de Mina puisqu'il connaissait la réponse aussi bien qu'elle. Dan Lotyuwi était encore couché, et profondément endormi.
C'était toujours le même refrain avec lui le lundi. Le réveil sonnait à 6h30 mais il prenait tout son temps pour sortir de la douce contrée onirique pour revenir au monde réel. Généralement, Dan prenait près d'une demi-heure pour sortir du lit. Et Mina ne faisait pas grand chose pour le changer. Pourquoi ? Parce qu'elle trouvait que cela lui donnait un certain charme. Elle a tenté maintes fois de l'obliger à se réveiller en même temps qu'elle, mais très souvent, lorsqu'elle se trouvait face à cette masse somnolente et étendue sur le matelas, il lui était complètement impossible d'agir. Elle était totalement impuissante face à ce visage enfantin et béat qui appartenait à son fiancé. Elle savait qu'il rêvait beaucoup et que, lorsqu'il lui arrivait d'entendre le récit d'un des songes de ce dernier, elle était transportée dans un autre univers. “Troubler son sommeil serait équivalent à commettre un crime”, disait-elle.
Pourtant, ce matin-là, l'attitude de Mina était différente. Elle posa son bol de lait vide dans l'évier et se dirigea vers l'escalier. La pendule affichait 6h45 et elle se doutait que Dan marchait toujours en compagnie du marchand de sables. La chambre dans laquelle ce tout jeune couple dormait était celle occupée par Yusuke et Akiyo et plus récemment, Shizuka Guzi. Et Dan avouait qu'on y dormait beaucoup mieux que dans son ancienne chambre. Mina ouvrit la porte et vit que Dan dormait bel et bien à poings fermés, s'étant presque enroulé dans la couverture, un large sourire sur les lèvres. C'était à prévoir et la jeune femme se tint au pied du lit.
- Je te donne trois secondes… et j'ai bien dit trois secondes pour sortir de ce lit et te préparer pour aller en cours où bien je te jette un seau d'eau bouillante dans la figure.
Elle n'obtint pas de réponse et commença le décompte. À un, Dan ne bougea pas, tout comme à deux. Il finit par émerger très lentement de son lit lorsque Mina alluma la lumière, qui était particulièrement forte, puisqu'il avait changé l'ampoule la semaine précédente. Une sorte de grognement d'ours résonna dans la chambre lorsque le visage de Dan apparût très clairement dans le champ de vision de sa fiancée. Il ne souriait plus, c'était une certitude.
- Ce n'est pas que je n'aime pas te voir dormir. Au contraire, tu es encore plus mignon quand tu dors, mais… j'aimerais bien que, pour une fois dans l'année, on aille ensemble à l'université. Depuis le début de l'année, tu n'y a pratiquement pas mis les pieds.
- Et c'est pour ça que tu viens me réveiller ? questionna ce dernier.
- Ça me ferait plaisir, dit Mina en lançant des vêtements à Dan, qui les attrapa.
Il se leva et, rien qu'en voyant le torse dénudé du jeune homme, Mina ne put s'empêcher de rougir. Elle connaissait ce corps et le côtoyait encore il y a plus de vingt minutes, mais c'était comme ça. La vue de ce torse, qu'elle trouvait splendide, “digne d'une statue antique”, recouvert par cette peau de velours, c'était toujours quelque chose qui lui vendait du rêve, qui l'enchantait au plus haut point. Elle resta plantée au pied du lit tandis que Dan, ses vêtements en main et murmurant à l'oreille de Mina : “Si c'est pour te faire plaisir, alors je peux bien accepter”. Encore fatigué, il bâilla avant de quitter la chambre et de se rendre dans la petite salle de bains du premier étage, à savoir la porte sur sa gauche. Il en ressort cinq minutes plus tard, un peu moins dans le brouillard et descendit dans la cuisine, où il salua Warren avant d'avaler trois verres de jus d'orange. Tandis que Mina n'était toujours pas redescendue, Warren demanda :
- C'était quoi la contrepartie du réveil cette fois-ci ?
- Juste venir en cours avec elle, pour lui faire plaisir, dit Dan. C'est tellement prévisible mais je ne peux m'empêcher de céder à la pression.
- Pourquoi ?
- Elle me ferait culpabiliser.
- C'est que vous êtes faits pour être ensemble. C'est le plus important.
Dan acquiesça tandis que Mina finit par redescendre en direction de la cuisine. Voici l'un des rares matins où les trois résidents du 26, Kamen Street se trouvaient ensemble au petit-déjeuner à sept heures du matin. La jeune femme s'assit en compagnie de ses deux amis et un immense sourire était dessiné sur ses lèvres. Dan l'avait parfaitement remarqué et ne pouvait s'empêcher de pouffer de rire, ce qui provoqua la même réaction chez Warren. L'ambiance était toujours là dans cette maison et c'est une des raisons qui ravissait son propriétaire. Cela ne faisait à peine trois ans que tout son quotidien fut bouleversé par l'apparition de Kaly. Avant, il se satisfaisait pleinement de la compagnie de sa regrettée marraine et gouvernante, Shizuka Guzi. Pendant presque quinze ans, leur vie à tous les deux n'était pas vraiment des plus mouvementées. Ils avaient voyagé aux quatre coins du monde, recevaient les membres de la famille Lotyuwi qui passaient par là…
Dan jeta un bref coup d'œil à travers la fenêtre, apercevant une espèce de petite planche blanchâtre au beau milieu de la pelouse qu'il a tondu deux jours plus tôt. Soudain, alors qu'il se remettait de son éclat de rire et qu'il buvait une gorgée de thé, une espèce de flash lui traversa l'esprit, un peu comme si le fait d'avoir posé les yeux dans le jardin avait déclenché une cinématique dans un jeu vidéo style “point and click”. Et cette vision n'était en réalité qu'un flash-back de plusieurs éléments. Les ruines du Palais d'Endlenda, l'armée de Nephomet, le petit groupe de Duelliste et de monstres de Duel, Dan qui se battait contre Dilvolg, Shizuka arrivant de nulle part, un Duel acharné, la gouvernante défaite et assassinée par nul autre que ce scélérat de Nephomet, et Dan qui creuse un trou à l'arrière de la maison, aidé par les enfants et les Flame Charmer… tout cela remonta directement dans sa mémoire immédiate et il ne put s'empêcher de se sentir un peu triste. Cette espèce de planche n'était pas qu'une simple planche, c'était la pierre tombale de Shizuka. Et Dan y déposait un bouquet de fleurs tous les mois. Des orchidées, “ses préférées…”
- Dan ? Tu m'entends ?
- Hein ? dit-il en retournant la tête dans la direction opposée à la fenêtre.
Il ne s'était pas rendu compte que Mina lui avait posé une question.
- Excuse-moi, j'étais ailleurs…, avoua-t-il. Qu'est-ce qu'il y a ?
- Est-ce que tu seras là à midi et demi pour manger avec moi ? Ou bien tu seras au dojo ou alors ici ?
Le dojo ? Mais bien sûr ! Dan avait complètement oublié le dojo. Il avait dit qu'il l'ouvrirait cette semaine. Il y avait tellement pensé que c'en était presque devenu une obsession pour lui depuis ces derniers mois. Aujourd'hui, il devait imprimer des flyers pour les distribuer à l'université, avant de s'occuper des affiches. Une nouvelle étincelle jaillit dans son esprit et il répondit à Mina :
- Je serai là à midi et demi. Ne t'en fais pas.
- Merci beaucoup.
Un quart d'heure plus tard et les trois personnes étaient prêtes à partir. Le temps était maussade mais rien n'indiquait qu'il allait pleuvoir. Mina prit son parapluie au cas où. Un vif courant d'air frais balaya les quelques feuilles mortes qui commençaient à tomber doucement sur la cour avant. Mina rappela à Warren que c'était à son tour de ramasser ces feuilles. La maison fonctionnait sous un système de corvées très bien organisé. Chacun alternait sur une activité toute les semaines. Et avec le travail universitaire qui devenait de plus en plus conséquent pour Warren et Mina, Dan acceptait d'en faire un peu plus à la maison – chose qu'il acceptait sans rechigner puisqu'il n'allait que très rarement sur le campus –.
Pendant presque quarante minutes, les trois personnes marchaient tranquillement vers l'université, discutant à propos du futur dojo de Dan, des films qu'ils pourraient regarder en soirée, des cours et tant d'autres banalités. C'était le même rituel à chaque fois que Dan se rendait en cours, ce qui n'a dû arriver qu'une dizaine de fois à peine. Lorsque Dan faisait sa grasse matinée habituelle, Warren était toujours le premier des trois à se rendre en cours, étant donné que Mina cherchait à le réveiller par tous les moyens, avant de le laisser dormir.
Une fois arrivés, Dan esquissa un très léger sourire en voyant le complexe universitaire d'Akinokuwa, comme s'il était sûr de lui qu'il avait dû commettre une erreur avant de vouloir s'y inscrire. De toute façon, lui ce qui l'intéressait, ce n'était nullement les cours. Il ne se vantait pas du fait qu'il était surdoué et que cela pouvait lui permettre d'intégrer les meilleures écoles du mondes. Un de ses professeurs, M. Kanowski, avait dit à son sujet lors du dernier conseil de classe : “Je crois, sans aucun doute, que nous avons le gâchis intellectuel le plus conséquent de toute l'histoire de notre école… si ce n'est du pays entier.”. À ce moment-là, Dan avait choisi d'intégrer “par défaut” l'université d'Akinokuwa, alors qu'il pouvait sans problème intégrer Oxford, Cambridge, Harvard ou Yale.
À quoi ressemblait l'université de Dame Akinokuwa ? Il s'agissait d'un ensemble de huit bâtiments disposés en rose des vents. Chaque département occupait un des points cardinaux. La répartition se faisait comme suit : Nord : langues. Nord-est : littérature. Est : psychologie. Sud-est : histoire et géographie. Sud : économie et droit. Sud-ouest : arts. Ouest : sciences physiques et mathématiques. Nord-ouest : médecine. Il y avait un bâtiment au centre qui est celui du sport universitaire. Du point de vue architecture, c'était souvent décrit comme étant un “travail moderne de haute qualité”. En même temps, il a été grandement rénové suite à la guerre avec les Démons. En effet, une faille dimensionnelle s'était ouverte au beau milieu de l'endroit où se trouvait actuellement le gymnase. Auparavant, il était situé au nord de la rose des vents. Après les travaux de reconstruction, chaque bâtiment était une très grande structure mêlant béton armé, acier, grandes baies vitrées. Chaque aile universitaire mesurait près de cent cinquante mètres de long pour vingt mètres de haut, et était reliée à ses voisines par des passerelles couvertes en cas de pluie.
Cependant, il n'y avait pas que les bâtiments hauts de gamme à l'université d'Akinokuwa. Chaque espace non construit était d'un vert si éclatant qu'on aurait pu se croire dans les plaines collinaires du Connemara. Des rangées d'arbres occupaient tel ou tel espace, des bosquets, des haies de buissons, des parterres de fleurs… L'université était presque un micro-climat tellement tout respirait la nature. De même que sur chaque bâtiment, il y avait des panneaux photovoltaïques d'installés, ainsi que des éoliennes. La ville a investi énormément d'argent pour faire de cet endroit un établissement universitaire comme on n'en trouve nulle part ailleurs, et elle commençait enfin à obtenir des bénéfices.
En voyant cela, Dan ne pouvait que s'émerveiller. Warren le regarda et il se rendit compte que ses yeux débordaient de joie. Il ne put s'empêcher de le lui faire remarquer, non sans une certaine pointe d'humour :
- Dan…
- Oui ?
- Si tu étais moins fumiste, tu pourrais être fasciné tous les jours devant l'université.
- Justement. C'est pour ça que je ne viens quasiment pas. Je préfère garder ce genre de sentiment qu'occasionnellement.
- C'est vraiment étrange, dit Mina en souriant.
- Je vis dans une splendide maison avec des gens adorable. Je préfère mille fois étudier au 26, Kamen Street plutôt que dans cet endroit, bien qu'il soit magnifique. Voilà pourquoi je ne viens que rarement ici.
- Si tu le dis…
Le premier cours débutait dans moins de trente minutes. Les trois étudiants devaient faire le tour du campus étant donné qu'ils arrivaient à l'aile nord-ouest. Warren et Dan s'arrêtèrent au nord-est tandis que Mina marcha jusqu'à l'est du campus, car là avaient lieu les cours de psychologie.
À l'intérieur du bâtiment littéraire, Warren et Dan marchaient tranquillement. Et comme Dan ne venait que très rarement, ses venues sont identiques à l'apparition d'un Pokémon légendaire. Sa réputation en tant que Duelliste était assez incroyable et tous les pratiquants en profitaient pour lui demander des autographes. Bien évidemment, il y avait tout un groupement de filles qui, bien qu'elle avaient vingt ans ou plus, espéraient pourvoir déclarer leur flamme au jeune homme. Du coup, il tentait de se frayer un chemin, souvent accompagné par Warren. Lui aussi était courtisé en tant que célibataire et ils n'en pouvaient plus tellement cela durait depuis le lycée, que cela avait réellement débuté après leur victoire au Golden Tournament et qu'après la guerre avec les Démons, leur cote de popularité était montée en flèche.
Traversant le “panel de poules” comme disait parfois Dan – du moins, lorsqu'il était incroyablement fatigué –, Warren parvint enfin à rejoindre sa salle de classe. Il s'agissait d'une salle informatique où il prenait part à un site de nouvelles, qu'il se chargeait, lui et une trentaine d'autres étudiants, d'actualiser. Juste avant d'entrer dans la salle, Dan le tint par le bras et lui demanda :
- Au fait, est-ce que tu pourrais m'aider pour les affiches du dojo. Je dois encore les imprimer.
- C'est-à-dire ?
- Ben… juste me trouver une imprimante et du papier, de préférence glacé ainsi que des formats A2 à A5.
- Tu n'es quand même pas sérieux à me demander tout ça ?
- Regarde-moi et dis-moi si j'ai l'air de te raconter des conneries ?
Warren savait parfaitement que Dan ne plaisantait pas. Lui, tout ce qu'il voulait, c'était pouvoir ouvrir son dojo. Et Warren avait promis de lui donner un coup de main, de quelque façon que ce soit. Il se revoyait à genoux, en train de poser les lattes du sol. Jamais il ne s'était aussi plaint après avoir travaillé tellement son dos était endolori. Lorsque ses yeux croisèrent ceux de Dan, il ne pouvait pas faire grand chose d'autre que d'accepter de l'aider.
- Combien te faut-il de papier ?
- Deux format A2, pareil en A3, quarante en A4 et une petite centaine en A5…
- Une petite centaine ??? dit Warren en écarquillant les yeux. T'as idée du prix de la photocopie ici ? Surtout qu'on doit aussi boucler le journal ce soir.
- Ben justement… utilise ça. Je te retrouve à dix heures et demi à la salle de photocopies.
Il sortit de son manteau un porte-monnaie et le donna à un Warren complètement médusé. Il prit ensuite la direction de sa salle de classe afin d'y piquer un petit somme. Son ami regarda le contenu de ce qu'il vient de recevoir et il fut stupéfait de voir qu'il y avait de quoi imprimer plusieurs milliers de feuilles. En même temps, c'était normal puisque Dan avait les moyens de se payer à peu près tout ce qu'il voulait. Warren rangea le porte-monnaie et alla s'installer devant son ordinateur, qu'il alluma sans trop se soucier de ce que son professeur lui demandait. Le plus important pour lui était de se saisir discrètement de son portable et d'envoyer un message à Mina :
“Il faut vraiment faire quelque chose pour Dan.” envoyait-il à son amie, en plein cours magistral sur le béhaviorisme, les pensées de Watson et de Skinner. Honnêtement, c'était le genre de cours sur lequel elle était incroyablement attentive. Et lorsqu'elle sentit son portable vibrer dans la poche de son manteau, elle s'empressait de le sortir et de voir le message envoyé par Warren. En toute logique, lorsque quelqu'un venait lui parler de Dan, elle répondait pratiquement instinctivement et instantanément. Tout en prenant son cours en note, elle tapotait sur l'écran de son smartphone : “Qu'est-ce qu'il a encore fait ?”.
C'était à peu près le même rituel. Elle demandait toujours la nature du problème de Dan pour essayer de trouver une réponse et le changer. La plupart du temps, c'était Warren qui venait lui signaler ce genre de chose. C'est un peu étrange de voir ce comportement de la part de Warren, qui ressemblait davantage à un enfant de maternelle qui balancerait un camarade de classe à la maîtresse d'école pour avoir gribouillé sur les tables ou bien découpé son sweat. Or, à chaque fois que Mina recevait un message de la part de Warren à propos de Dan, c'était toujours pour des broutilles, si bien qu'ils se demandaient pourquoi ils en parlaient.
Mina reçut une réponse rapide de la part de Warren à propos de ce que Dan lui a demandé : “J'ai l'impression qu'il devient de plus en plus arrogant, surtout qu'il me demande de monopoliser la photocopieuse du bâtiment pour près de quinze mille yens”. Un autre message vint juste à la suite : “Il faut que tu essayes de le raisonner. Ça devient un peu insupportable…”. Mina sembla halluciner en voyant cela. Elle ne répondit pas tout de suite, étant donné que sa voisine de classe voulait poser une question et que le professeur regardait dans sa direction. Elle se dépêcha de ranger son portable et reprit la phrase qu'elle était en train de noter. Elle savait qu'elle devait faire quelque chose puisque Warren n'est pas du genre à rester les bras croisés. Kaly lui avait expliqué que ses origines démoniaques pouvaient le rendre particulièrement dangereux et qu'il fallait mieux éviter de le troubler.
Les cours passèrent et Mina attendait patiemment que la fin de la matinée sonna. Vers midi et quart, alors qu'elle assistait à un cours sur la psychologie de Freud et qu'elle prenait attentivement le cours en note, la porte de la salle s'ouvrit brusquement. Mina hallucina lorsqu'elle vit les personnes qui firent leur apparition dans cette salle peu remplie.
- Dan ? Warren ? s'étonna Mina. Mais que faites-vous ici ?
En effet, Dan et Warren se tenaient sur le pas de la porte de la salle de classe, le grand blond portant tout un paquet de papier dans ses bras tandis que l'autre larron tenait deux sacs, sans doute chargés de flyers destinant à faire un petit coup de pub pour son dojo. L'horloge accrochée au-dessus du grand tableau n'indiquait pas midi et demi, l'heure à laquelle Dan devait rejoindre Mina pour qu'ils puissent déjeuner ensemble. Ce dernier avait l'air très joyeux.
- Qu'est-ce qu'on fait ? Nous sommes venus te chercher, bien sûr ! dit Dan, enjoué.
- Ne peux-tu pas attendre un petit quart d'heure, le temps que le cours se termine ?
- Pas des masses, non. Je commence à avoir faim et on doit poser toutes les affiches.
Derrière lui, Warren avait l'air affreusement dépité devant la scène complètement burlesque et ridicule dans laquelle Dan l'avait entraîné. Il regarda autour de lui et vit les paires d'yeux des étudiants, peu nombreux soient-ils, qui étaient censés écouter un cours sur les Topiques de Freud, et qui se retrouvent devant une scène de ménage digne des plus grands vaudevilles. Et le professeur ne semblait pas apprécier cela.
- Monsieur Lotyuwi, je suppose ?
- Madame Harukawa, répondit ce dernier en s'inclinant.
- Je crois, sans trop m'avancer, que vous n'avez vraiment aucun respect pour tous ces étudiants qui travaillent, eux, ainsi que leur professeur, chargé de dispenser un cours, mais aussi votre camarade derrière vous, et… le plus important, votre amie Mina Mizunori ici présente.
La jeune femme se leva aussitôt et s'inclina en signe d'excuses. Elle quitta sa place et se dépêcha de rejoindre son fiancé.
- Dan, tu ne peux pas te permettre de venir comme ça, de perturber les cours, de faire ce qu'il te chante…
- Excusez-moi, mademoiselle Mizunori, interrompit Mme Harukawa, mais ce n'est pas à vous de commenter les actions de votre… ami.
- Mais je… C'est à moi de régler cette affaire…
- Retournez vous asseoir, dit-elle à Mina en redressant ses lunettes sur son nez.
- De quel droit osez-vous vous adresser de la sorte à ma fiancée ? dit Dan en élevant le ton de voix.
La remarque suffit à faire écarquiller les yeux des étudiantes, qui faisaient partie des groupies habituelles de Dan lors des tournois et qui, à juste titre, jalousaient un peu Mina. La nouvelle de leurs fiançailles n'avait encore jamais été dévoilée depuis qu'il a fait sa proposition le jour de son anniversaire il y a deux ans.
Mina rougit comme une pivoine en retournant au fond de la salle. Et la professeur de psychologie n'avait pas l'air si indifférente en entendant cela. À vrai dire, Aoko Harukawa était également une Duelliste et, à ce titre, a participé à quelques compétitions comme le Golden Tournament. Lors de l'édition précédente, elle s'est mesurée à l'équipe de Dan lors des huitièmes de finale et son équipe s'est logiquement inclinée, en se battant ardemment toutefois. Cette enseignante, âgée de quarante-trois ans, avait justement perdu la manche décisive contre la personne qui se trouvait juste en face d'elle dans cette salle de classe. Cependant, le Dan qu'elle avait affronté et celui qui a osé interrompre son cours étaient complètement différents.
- Monsieur Lotyuwi…
- Qu'est-ce qu'il y a, Aoko ? dit-il en l’appelant par son prénom, ce qu'il fait très souvent.
Aoko tenta de lui répondre mais d'un geste de la main, Dan l'empêcha de sortir le moindre mot. Au lieu de ça, ce fut lui qui donna une réponse à sa propre question :
- Vous allez certainement me dire que…
- SUFFIT !!! hurla la professeur.
Dan écarquilla les yeux et à ce moment-là, Warren recula d'un pas lorsqu'il vit que son ami laissa tomber les deux sacs plastiques qu'il avait dans les mains. La réaction sanguine de Mme Harukawa surprit également Mina et le reste de la classe, qui commençait doucement à se terrer derrière leur cours, essayant de comprendre les détails des concepts du “Ça”, du “Surmoi” et du “Moi”, tout en gardant un œil attentif à ce que leur professeur avait à dire à Dan.
- Monsieur Lotyuwi, vous avez beau avoir sauvé le monde de ces Démons, créant au passage le bazar le plus important que notre pays a pu connaître depuis près de soixante-dix ans. Il n'empêche que vous n'êtes qu'un petit gamin prétentieux et désireux de se faire voir de l'ensemble du monde. Vous avez vingt ans si je ne me trompe pas ? Il serait peut-être temps de mûrir un peu plus, vous ne trouvez pas ?
Ces quelques mots effrayèrent Warren, puisque Dan inclina légèrement la tête, ce qui eut pour effet de provoquer un léger craquement dans les articulations du cou. Il savait que si Dan effectuait le moindre pas en avant, la professeur en prendrait très certainement pour plus d'un semestre d'hospitalisation et de rééducation, ce qui la renverrait à ses cours sur Dolto ou bien l'expérience de Milgram. Dan n'était pas du genre à se laisser marcher dessus aussi aisément.
“Je suis sûr que ça te rappelle quelque chose…”, résonna une voix dans sa tête. Il n'avait pas à chercher bien loin pour trouver un tel affront. Il avança très légèrement son pied gauche, tout en tenant parfaitement sa garde. “Il va lui coller une droite”, pensait Warren, en voyant ce poing fermé qui pouvait terminer sa course en plein dans la mâchoire d'Aoko Harukawa.
- Je me fiche éperdument de ce que vous pouvez penser à mon sujet, si c'est bien ce qui vous dérange, Aoko. Mais je préfère être franc avec vous : votre cours de psychologie, je n'en ai cure. Pas besoin d'avoir quinze diplômes universitaires pour étudier le fondement de la pensée d'un être humain. La preuve, vous êtes en train de trembler de tous vos membres en vous demandant ce qui est en train de se passer. Voyez à quel point un complexe d'infériorité peut se révéler cruel pour quelqu'un deux fois plus âgé que la personne qu'elle a en face.
Il avait raison. Mme Harukawa était comme pétrifiée devant l'aura de Dan, mêlant sérénité, effroi et assurance. Elle ne voulait en aucun cas la dévoiler devant ses élèves. Et les yeux grands ouverts de Dan, limite globuleux, suffisaient à ressortir tout ce qu'elle craignait le plus au monde. Dan agissait comme un maître de l'hypnose, poussant un patient – ou une victime – à revivre les moments les plus terrifiants de sa vie. C'était bien simple, on aurait cru revoir les discussions entre Clarence Starling et le Dr. Lecter.
- Vous méritez que je vous fasse renvoyer, bégayait-elle.
- Et alors ? Je me fiche complètement de cet endroit. Rien qu'en bougeant les bras et les jambes en un mois, je gagnerai plus que votre salaire brut en un mois.
La réaction était tout simplement étrange, surtout de la part d'Aoko. L'argument économique pouvait toujours faire son petit effet, ce qui était le cas. En voyant le visage de la professeur, Mina se leva et s'interposa entre Dan et Aoko.
- Dan, je t'en prie. Arrête et rentre à la maison !!
Son regard croisa celui de Dan et cela suffit pour que le jeune homme se calme. Il reprit ses sacs et avant de repartir, il fixa Aoko dans les yeux.
- Je sais ce que vous ressentez au plus profond de vous, Aoko, dit Dan avec un sourire presque diabolique. Par respect pour votre personne, je ne vais en aucun cas continuer à vous torturer mentalement et vous laisser terminer votre cours.
La fin du cours était passée depuis cinq minutes et Dan rentra directement à Kamen Street, sans même dire un mot à Mina ou Warren. Aoko Harukawa était plantée au beau milieu de la salle, impuissante, vidée de toute énergie, abattue. Ses élèves ne prirent aucun risque en ne lui souhaitant pas un “Bonne fin de journée”, qui aurait sans doute des répercussions tout à fait inimaginables étant donné les dégâts que Dan a causé en faisant son apparition un quart d'heure plus tôt.
Pendant que Warren, Nejma et Veneko étaient à l'hôtel Saint-John, Mina rentrait à Kamen Street après une journée chargée en émotions. Elle a passé tout son après-midi à réfléchir à ce qu'elle allait bien pouvoir dire à son fiancé, espérant bien obtenir une réponse quant à ses agissements, ainsi qu'une promesse d'excuses envers Mme Harukawa, qui, selon l'un de ses collègues de psychologie, a pris son après-midi. Mina n'en revenait pas d'avoir vu un spectacle d'une telle tristesse, et particulièrement honteux pour elle. C'était pour cela qu'elle a demandé à une amie de lui passer ses notes tandis qu'elle griffonnait autre chose sur des feuilles volantes. Elle les avait repliées et mises dans sa poche lorsque la sonnerie marqua la fin du cours.
Une fois arrivée à la maison, elle ouvrit doucement la porte d'entrée, se méfiant de ce qui pourrait bien lui arriver, de la même manière qu'on entrerait dans une bâtisse qualifiée d'abandonnée. Elle devait sans doute s'attendre à un salon plongé dans l'obscurité et tout à coup, la lumière l'aveuglant et Dan présent sous ses yeux. Pourtant, ce n'était pas le cas. Les rideaux n'étaient même pas tirés et une douce odeur de viande grillée s'élevait dans le salon.
- Dan ? Est-ce que tu es là ?
Elle n'obtint aucune réponse. Après tout, Dan avait peut-être son casque sur les oreilles pour cuisiner, ce qu'il faisait souvent. Mina posa son sac et fit un pas avant que sa voix résonne :
- J'ai presque fini de cuire la viande. C'est prêt dans cinq minutes.
- Il faut que je te parle, dit-elle sans faire attention à ce qu'elle venait d'entendre lorsqu'elle entra dans la cuisine.
Quand elle vit Dan, elle parut extrêmement perturbée de voir qu'il était assis à table, après avoir installé le couvert pour eux deux. Warren ? Il avait prévenu Dan qu'il resterait à l'hôtel Saint-John pour la soirée, les laissant par la même occasion tous les deux. Deux bougies étaient allumées sur la table, soigneusement revêtue d'une jolie nappe nacrée. Il portait effectivement son casque, qu'il enleva et rangea dans un tiroir à côté, et un tablier. Regardant sérieusement le visage mi-figue mi-raisin de sa petite amie, il se doutait que ce dîner en tête-à-tête n'était peut-être pas une si bonne idée que ça. Et pour cause, l'ordre de rentrer immédiatement à la maison provenait de Mina.
- Je sais que tu es remontée contre moi et que je devrais passer la nuit sur le canapé, mais… avant de te voir quitter la cuisine pour aller pleurer dans la chambre, je voudrais juste te présenter mes excuses pour avoir été affreux avec Aoko.
En moins de trois secondes, Dan réussit l'exploit de reculer sa chaise et de s'agenouiller devant une Mina vraiment perplexe. Elle n'a même pas eu le temps de dire quoi que ce soit qu'elle était dans une situation incroyablement tendue. Elle savait que le moindre mot pouvait provoquer une explosion similaire à celle d'une chaudière obsolète en plein hiver.
- Ces excuses ne devraient pas m'être adressées, Dan…, dit-elle en s'attendant au pire.
- Je sais. J'ai appelé Aoko juste avant que tu n'arrives et je t'ai évité une sanction.
- Une… sanction ? Pour moi ? hallucinait-elle.
- Sévère, certes. Et elle a avoué que c'était complètement risible, de devoir te coller un blâme pour quelque chose que moi et moi seul aie fait.
- Justement… à propos…, commença-t-elle.
Le sourire de Dan changea radicalement de sens, faisant un spectaculaire demi-tour. Mina prit le temps de s'asseoir, imitée par son interlocuteur, et sortit son portable, avant de lire les message qu'elle avait reçu de Warren ce matin-là. Dan baissa les yeux et une sorte de faible petit rictus sortit de sa bouche mais ce fut tout ce qu'il put dire.
- Je m'inquiète énormément pour toi, Dan. Je sais que je ne devrais pas, que tu dis être suffisamment grand pour te prendre en main, que tu n'es plus ce lycéen qui m'avait invitée ici après m'avoir vu en larmes dans ma chambre… Tu as clairement changé, et à en croire Warren, ce n'est pas en bien. Dis-moi ce qui se passe ?
Dan esquiva le regard de Mina, sachant que cette dernière serait au bord des larmes si quelque chose venait à les séparer. Il prit son temps pour trouver une réponse mais cette situation lui paraissait vraiment familière, comme si… Mina avait repris le rôle qu'occupait Shizuka. Prenant une légère inspiration, il releva la tête et voulait déballer ce qu'il avait sur le cœur mais aucun son ne sortit de sa bouche :
- Qu'est-ce qu'il t'arrive, Dan ?
- Je… Je ne sais pas… comment te le dire. C'est vraiment compliqué et je ne veux pas que tu sois autant inquiète pour moi.
- Et si j'ai justement envie de m'impliquer ? dit Mina en se levant et en s'asseyant sur les genoux d'un Dan confus.
Il la prenait par la taille et elle prit sa tête qu'elle serrait contre son corps. Elle caressa tendrement ses cheveux tandis qu'il faisait promener ses doigts dans son dos. Un murmure sur un ton maternel résonna dans ses oreilles, tel une prière que l'on réciterait :
- Je t'aime, Dan, et je m'en voudrais de ne pas pouvoir t'aider. S'il te plaît… essaye de me dire ce qui ne va pas.
Aussi étrange que cela puisse paraître, cela raviva une certaine lumière dans l'esprit de Dan. On pourrait rétorquer que c'est le “pouvoir de l'amour” qui fait délier les langues mais la relation entre Dan et Mina est si puissante que chacun sait comment persuader l'autre de se dévoiler en toute sécurité et en toute confiance.
- J'ai peur…
Ces trois mots suffirent amplement pour amplifier l'étreinte chaleureuse et maternelle de Mina Mizunori, qui, d'ici quelques années, sera unie pour la vie à Dan. Elle sentit une larme qui tombât de la joue de Dan sur son bras et agit comme une vraie mère réconfortant son enfant après qu'il a fait un terrifiant cauchemar :
- Peur de quoi ?
- Peur de devenir une créature malfaisante… peur d'être devenu un Démon… peur de la fin du monde.
Un rythme ternaire doublé d'une gradation inversée émis du plus profond de l'esprit de Dan parvint jusqu'aux oreilles de Mina, qui n'a pas l'air de comprendre le lien qui peut y avoir entre ça et son comportement désinvolte et provocateur ce matin, ainsi que les autres moments où certains ont pu se plaindre de lui.
- Est-ce que tu te sens capable d'expliquer ce que tu as dit ? ajouta-t-elle, toujours avec cette voix suave et marquée d'une certaine touche d'assurance.
- J'ai… la… sensation qu'ils sont… toujours… là. Et cette vision… de moi en train de… détruire le monde me… terrifie.
- Est-ce que tu as fait d'autres cauchemars ? questionna-t-elle après un temps de réflexion.
- Toujours le même… Depuis près de deux ans…
Mina embrassa le front de son chéri et posa sa tête sur la sienne avant de lui sécher cette seconde larme et le rassurer :
- Je crois que tu devrais passer à autre chose. Tu sais, cela fait deux ans que notre ville a retrouvé son calme et je peux comprendre que certaines choses aient pu te traumatiser. J'en ai fait l'expérience. Tu diras sans doute que les cicatrices ne se fermeront sans doute jamais totalement mais… tu peux faire en sorte que la douleur soit moindre.
- Si tu le dis…
- Et en ce qui concerne tes cauchemars, je crois qu'il n'est pas bon pour toi de ressasser encore et encore tes rêves. Cela trouble ton sommeil.
- Que dois-je faire ? Ne plus rêver ? Ne plus dormir ?
- Arrête de plaisanter, dit-elle en répondant au sourire qui revenait sur le visage de son interlocuteur. Essaye tout simplement de chasser ces cauchemars et de ne plus y penser.
- Je crois que le plat a presque refroidi…
Les deux ventres se mirent à gargouiller avant que Mina ne se rende compte qu'il est déjà huit heures et quart. Elle rit un peu en se relevant et alla s'asseoir, tandis que le cuisinier du soir apporta la viande qu'il avait fait griller juste à côté et qui, effectivement, dut repasser au micro-ondes afin de réchauffer un peu. Les bougies s'étaient longuement consumées et un peu de cire rosée avait durci sur la nappe.
Tous deux prirent leur repas en tête-à-tête, ayant convenu que leur discussion à propos des cauchemars était close. Mina fit promettre à Dan qu'il se tienne un peu mieux devant les professeurs, sachant qu'il a déjà raté plusieurs mois de cours et que certains commençaient à l'avoir dans leur collimateur. Leur soirée se rattrapa un peu, surtout grâce à la stratégie employée par Mina de le ramener vers des sujets de conversation bien plus positifs tels que le dojo d'arts martiaux qui ouvre en fin de semaine, les Duels, quelques réflexions sur la psychologie et surtout… un sujet qui tient Mina particulièrement à cœur : le mariage. Même s'il n'aura lieu qu'à la fin de leurs études – du moins, celles de Mina –, elle prenait le temps de détailler sa vision d'un mariage qui les rendraient heureux.
Vers onze heures du soir, une fois la table débarrassée, un peu de détente, prenant la forme de quelques pas de danse sur la voix du regretté Prince, de conseils en arts martiaux, et un bain pris en amoureux, le couple du 26, Kamen Street alla se coucher, regardant à présent vers la journée de mardi, un peu plus tranquille en terme d'emploi du temps. Dan a promis de venir mais d'être un peu plus calme, surtout qu'il doit débuter sa campagne de publicité pour son dojo. Une fois tous les deux sous la couverture en flanelle, Dan embrassa Mina avec délicatesse avant d'éteindre sa lampe de chevet. Mina l'imita et plongea la chambre dans le noir, rythmés par un “Bonne nuit mon cœur” lancé simultanément comme un bouquet de fleur un jour de noces.
“Il dort paisiblement, comme à son habitude… du moins, je l'espère…”. Voilà la phrase qui occupait l'esprit de Mina pendant une bonne partie de la nuit. Elle songeait encore à ce que Dan a pu lui dire tout à l'heure. Des cauchemars ? Dan ? C'était quelque chose d'envisageable, étant donné que cette guerre fut totalement éprouvante pour tout le groupe. Dan a connu son lot d'émotions fortes et Mina était parfaitement au courant, étant donné qu'elle a pu avoir un résumé journée par journée de tout ce qu'il avait pu faire depuis leur arrivée en Endlenda jusqu'à leurs retrouvailles dans l'ancien hôpital militaire. “Un syndrome de stress post-traumatique… Ces cauchemars ne sont rien d'autre qu'une manifestation d'un syndrome de stress post-traumatique et rien de plus”, se disait-elle tandis qu'elle ressentait le souffle tiède de la respiration de Dan, dormant à poings fermés à côté d'elle. Elle ne fermait pas les yeux, bien qu'elle le devrait, et tentait de faire ce qu'elle pouvait pour trouver une explication rationnelle à cela.
“Et si cette personne pouvait…”. Les derniers mots qui lui vinrent en tête n'ont pu permettre à l'étudiante en psychologie de trouver une solution ou les conseils d'un expert en la matière. Fatiguée de sa longue journée, Mina ne put faire autre chose que de tomber de sommeil, enlacée dans les bras de Dan, murmurant inlassablement les trois mêmes mots les plus courants de la déclaration romantique à l'oreille de la future madame Lotyuwi, qui en fit sa berceuse.
- Bloody Maiden
- Messages : 1078
Age : 25
Re: Le Réveil des Démons
Sam 8 Juin - 14:28
Chapitre 02 - Perspectives d'avenir...
- Spoiler:
- Dans une salle informatique de l'université d'Akinokuwa, une dizaine d'étudiants étaient en train de travailler sur la prochaine édition de leur magazine. Tous les ordinateurs étaient occupés par les rédacteurs, deux personnes discutaient de possibilités de nouveaux articles pour l'édition de la semaine prochaine, un autre buvait son café en consultant le courrier des lecteurs. Et… le dernier membre de l'équipe était endormi devant son ordinateur, à tel point que son voisin lui adressa un léger coup de coude pour le faire réveiller.
« Warren ? Tout va bien ? »
Le jeune homme ouvrit instantanément les yeux et les frotta avant de voir qui venait de le réveiller. C'était juste Isao Nishiori, un camarade de promotion, quelqu'un de très travailleur, l'exact inverse d'un Dan Lotyuwi, à part le fait que Warren le trouvait “aussi futé qu'un rocher”. Ce n'était pas le mauvais bougre et Warren s'entendait très bien avec lui en ce qui concerne le journal. Il avait un an de moins que Warren et ce dernier croisa son regard assez inquiet.
« Que… quoi ? dit-il en bâillant.
- Tu dormais. Si Manami te voyait, elle te…
- Elle ferait quoi ??? leur adressa une voix derrière eux. »
Warren et Isao écarquillèrent les yeux et n'osèrent se retourner pour affronter la rédactrice en chef du journal, Manami Houjo, surnommée la “Reine”. Lorsqu'il était ressorti de son bureau, Warren avait avoué à Dan et Mina qu'il n'avait pas vu de femme à la fois “bornée mais efficace”. C'était quelqu'un de très hautain, âgée de vingt-cinq ans, capable de terrifier un enfant de cinq ans juste pour qu'il se calme. Ses yeux marrons ressembleraient à s'y méprendre à ceux de Dan selon Warren. Elle donnerait l'impression d'être de sa famille tellement elle lui ressemblait. Elle était très intelligente mais ne supportait aucun ordre donné par quelqu'un qu'elle estimait inférieure à elle.
« Pourquoi est-ce que vous dormez au lieu de travailler, Warren ?
- Veuillez m'excuser, je suis vraiment épuisé.
- Quand même, ce n'est pas la première fois que je vous reprends sur cette question. Si vous voulez qu'on installe des hamacs ici, ne vous priez pas pour me le demander.
- Sans rire ? »
Manami posa sa main sur son épaule et le fusilla du regard. Il sentit que son trait d'humour n'était pas nécessaire et se racla la gorge avant de réfléchir sur quelque chose à demander à son interlocutrice. Ses yeux perçants le glacèrent, le clouèrent sur place tels ceux de Méduse, et il ne sut pas quoi dire, sinon :
« Reprenez votre travail, sinon je vous fais aussitôt remplacer.
- Oui, madame. »
Et elle alla à la fenêtre, prenant sa tasse de café au passage. Warren soupira et se tint la tête, regardant son clavier. Isao le regarda et lui murmura quelque chose qu'il n'entendit pas. Ce dernier haussa les épaules et reprit sa rédaction. Warren regarda les articles qui s'affichaient sur l'écran de son ordinateur, des faits divers, des pages économiques, du sport, un article centré sur un mystère à Hokkaidō, un autre sur des tribus amazoniennes en voie d'extinction. Reposant sa tête sur ses mains, il revint à cet état songeur qu'il avait il y a quelques minutes. Après quelques minutes de tergiversation, il finit par se lever et se dirigea vers la porte. Bien évidemment, Manami s'en rendit compte et lui demanda :
« Puis-je savoir où vous allez, Warren ?
- Cueillir des pâquerettes, si cela vous intéresse. Je vous fais un collier ? lui répondit Warren en ouvrant la porte de la salle. »
Sans même se rendre compte que ses collègues se retenaient de rire, Warren sortit de la salle, remarquant que Manami rougissait, sous le coup de la honte et de l'agacement. Elle ne supportait pas que son autorité soit remise en cause. Elle le suivit, avec l'intention de lui toucher deux mots à propos de son comportement. Mais lorsqu'elle mit les pieds dans le couloir, il n'y avait plus personne. Pas un rat dans le couloir, pas un seul bruit, si ce n'est que celui de son cœur qui battait. L'escalier le plus proche était à quinze mètres et aucun bruit de pas de Warren. Sous l'impulsion de sa curiosité, elle alla quand même voir la cage d'escalier et… celle-ci était aussi vide qu'une salle de classe le dimanche. Tant pis, elle passerait ses nerfs sur lui un autre jour, rentrant dans la salle informatique et continua son travail.
En fait, Warren était toujours dans le couloir, tout près de la porte, mais dissimulé derrière un pilier. C'était quelque chose qu'il aimait faire, s'isoler tout en se cachant du reste du monde. Remarquant que cette “Impératrice égocentrique” n'était plus aux alentours, il se leva et marcha à pas de loup, les mains dans les poches. Tout d'abord, il se rendit aux toilettes, histoire de se passer de l'eau sur le visage. Lorsqu'il vit son propre reflet, dégoulinant de cette eau qui lui donnait l'impression de chauffer au contact de son épiderme, il fut comme terrifié.
“Mais qu'est-ce qu'il m'arrive ? Pourquoi est-ce que je suis si distrait et crevé ces derniers temps ? Que faire ? À qui parler ? Isao ? Quand il saura utiliser un raccourci clavier sans se tromper, on verra… Manami ? Non ! Absolument pas elle ! Elle ne comprendrait pas la moindre chose. Toujours occupée par le fait de dénicher des interviews et de gueuler sur son personnel…”. Voici un aperçu de ce qui pouvait traverser son esprit alors qu'il se passait de l'eau sur le visage une cinquième fois. Fermant le robinet, il regarda encore une fois son propre reflet et se demanda ce qu'il était à présent. Puis…
« Toujours songeur, à ce que je vois ? dit une voix.
- Plus que jamais…, soupira Warren.
- Encore ces questions sur toi-même… et tu refuses d'en parler.
- Est-ce que je peux te poser un question ?
- Bien sûr.
- Est-ce que ça te dérangerait d'apparaître plutôt que de parler dans ma tête… Deneb. »
Aussitôt, Warren ne se trouvait plus tout seul. Une petite boule de lumière jaillit du néon et descendit lentement pour se retrouver face au jeune homme. Progressivement, elle se transforma en une sorte d'hologramme. Un visage enfantin, innocent, un corps phosphorescent recouvert par une armure étincelante. De l'or, du platine, des paillettes, de la poussière stellaire envahit cette petite pièce et illumina les yeux de Warren. Deneb fit face à son Duelliste et un sourire se dessina sur son visage, contrairement à l'autre, bien plus fermé.
« Puis-je savoir pourquoi tu me demandes d'apparaître comme ça ?
- Pour faire en sorte de m'adresser à une personne physiquement présente et qui est capable de comprendre ce que je lui dis.
- C'est tout ?
- Non !
- Ah… »
Warren était toujours planté face au miroir, les mains fermement posées sur la céramique du lavabo. Deneb se tenait juste à côté de lui, adossé contre le mur. L'air qui se dessinait sur son visage était complètement troublé. Il ne comprenait pas l'attitude de son Duelliste et ce n'était pas la première fois que cela se produisait. Maintes fois Warren lui fit appel pour demander conseil mais à chaque fois, la discussion se réduisait à un vide sidéral de mots. Le jeune homme n'arrivait pas à exprimer le moindre mot et son esprit de Duel était tout aussi incapable de lui faire prononcer quoi que ce soit. Parfois, cela pouvait durer trois minutes avant que Deneb ne disparaisse, ou bien cela s'éternisait sur une quinzaine de minutes puisque Warren insistait pour qu'il reste un peu plus longtemps, même si le fil de la discussion n'était pas toujours aussi étiré.
Cela lui rappelait quelque chose. Oui, bien sûr… tout était un peu plus clair dans ses yeux. Ce genre de blocage expressif, ces silences mortels, cette attitude repoussante, glaciale, éloignée et isolée… Il ferma les yeux et lorsqu'il les rouvrit, il n'était plus dans les toilettes du couloir. Non, il était ailleurs. Rien que l'odeur du désodorisant pour toilettes n'était plus là. C'était un tout autre lieu, lieu qu'il reconnaissait parfaitement puisqu'il le côtoyait tous les jours, au 26, Kamen Street. Une des chambres du premier étage, et plus particulièrement la sienne. Il se trouvait allongé sur son lit. Il ne comprenait pas ce qui était en train de se passer. Et lorsque la porte s'ouvrit, tout était encore plus flou, surtout lorsqu'une voix résonna dans ses oreilles :
« Que t'arrive-t-il, Warren ? »
Il tourna la tête et vit Mina, la tête légèrement inclinée, manifestant une inquiétude qui se voulait grandissante et effrayante. Elle avait un bloc et un crayon dans la main droite et l'autre sur la poignée. Lui ne savait plus trop quoi dire. Mentalement, il se trouvait dans un état entre le “perdu dans ses pensées”, le “début de dépression” et le “hyper fatigué”. Il tentait de parler mais ses mots n'étaient que des bribes de sons qui n'avaient que de sens que dans la bouche d'un bébé. Mina prit une chaise et s'assit juste à côté du lit. Elle le regarda et tourna la première feuille de son bloc avant de prendre son stylo en main et de dire :
« Dis-moi ce qui ne va pas ? »
Warren réfléchit un peu, se demandant toujours pourquoi il revoit ce moment dans sa tête, alors qu'il a juste eu lieu une semaine auparavant. Il cherchait à en comprendre la signification. Tout semblait aller et venir dans son esprit comme une foule dans un métro à l'heure de pointe. À quoi pouvait-il bien réfléchir comme réponse ?
« J'ai l'air perdu… »
Il avait développé cet art de la réponse purement laconique. Il se souvenait parfaitement de ces quelques mots qui ne permettaient nullement l'avancée d'une conversation. Personne ne pouvait faire grand chose lorsqu'il était dans ce genre de phase où il planait, sans consommer le moindre psychotrope. Comment Mina pouvait-elle tenter de l'aider quand la réponse obtenue était digne de provenir d'un toxicomane en pleine cure ? Elle avait énormément de mal mais faisait tout ce qui était en son pouvoir :
« Est-ce que tu as mal quelque part ? »
Elle essayait d'appliquer des méthodes apprises en cours de psychologie mais elle éprouvait le plus grand mal à définir les contours du ou des problèmes qui entourent Warren. Parfois, Dan venait aider mais là, il faisait les courses. Étrangement, Warren préférait plus se confier à Mina qu'à Dan, bien qu'ils soient extrêmement proches, à tel point que le jeune homme aux balafres ait fait le forcing auprès de Manami pour qu'elle décide de l'accepter dans son équipe rédactionnelle. Cela s'était réglé lors d'un Duel où, si Dan venait à perdre, il devrait payer la location du bâtiment qu'elle aurait aimé pour installer son futur journal.
Pour Warren, c'était du pain béni, quelque chose d'incroyablement inespéré pour lui. Au niveau scolaire, il passait du niveau “cataclysmique” à celui de “bourreau de travail”. Et Manami connaissait parfaitement le passé du jeune homme, à tel point qu'il s'est retenu de lui imprimer ses quatorze phalanges dans le visage lorsqu'elle lui a manifesté de façon ostentatoire son refus de l'intégrer dans son équipe. Il avait choisi la filière journalisme après le lycée, estimant que cela pourrait lui ouvrir de nouvelles portes. Son chemin menant à la rédemption était parsemé d'obstacles en tout genre et Manami en était un. Auparavant, les plus importants auraient pu lui coûter la vie.
« Mon ego le prend mal… »
Si l'on revenait deux ans en arrière, à l'issue de la guerre, Warren n'aurait sans doute jamais imaginé qu'il était passé à deux doigts du lynchage en bonne et due forme… en partie à cause de Dan et… de son père. Juste après le premier passage des Démons dans Akinokuwa, Dan avait fait une vidéo diffusée dans le monde dans laquelle il lançait un appel aux Duellistes du monde entier pour lutter contre les Démons. Et il ne s'était pas gardé de mentionner que l'un de ses amis avait rejoint leur camp. Bien évidemment, Warren s'était attiré l'ire d'Akinokuwa et, grâce aux autres Aces et quelques Duellistes influents, tout était rentré dans l'ordre. Et le fait que l'on parlât de lui comme du “fils d'un des Démons de l'Apocalypse” le blessait énormément. Tout le monde avait fini par le savoir et il en vivait difficilement.
« Tu n'es pas quelqu'un de mauvais, répondit Mina. »
Il ne l'était plus, voilà le plus important. Son ténébreux passé a été enterré comme il se doit, grâce à Kaly. Tout le monde autour de lui s'inquiétait de savoir si, en tant que fils de démon, il n'aurait pas certaines caractéristiques maléfiques. Kaly, l'Elfe Gardienne d'Endlenda, s'est vite chargée de le rendre pleinement humain, par une sorte de phénomène indescriptible. Quelques mois après la fin de cette guerre, il avait enfin pu retrouver une vie normale. Il s'était totalement repenti sur son attitude détestable. Mauvais, il ne l'était plus, voilà…
« Est-ce que tu te fais du souci pour quelque chose en particulier ? Dis-le moi si tu veux que je t'aide.
- Oui.
- Tu sais, Warren… fermer son esprit empêche les autres de pouvoir t'aider à trouver des solutions. Si tu ne te sens pas capable de répondre à tes problèmes par toi-même, tu ne peux pas te laisser dépérir dans ton coin. La clé, c'est le contact avec les autres. Ne sois pas asocial mais viens nous voir si tu estimes que quelque chose te paralyse. Nous serons là pour t'aider à obtenir ce que tu désires. »
S'il y avait bien un point commun entre Warren et Dan, c'était leur côté asocial. Tous deux cherchaient le plus souvent à éviter les autres, à part leurs amis, cela va s'en dire. Même à l'université, Warren parlait très peu aux autres.
« Mon avenir, je ne sais pas de quoi il sera fait, dit-il de manière très spontanée. »
Voilà une de ses préoccupations les plus sérieuses. Et elle n'était pas étrangère à tout le monde puisque beaucoup d'universitaires comme Warren n'avaient aucune idée de ce qu'ils feraient une fois leurs études terminées. Mina connaissait bien le problème puisqu'elle y a été confrontée quelques années plus tôt, avant d'opter pour la psychologie. Son temps de réflexion était un peu moins long que celui de Warren, qui durait déjà depuis plusieurs mois. Il avait choisi le journalisme mais se doutait qu'il ne pourrait pas en faire sa vie.
« Donc tu ne sais pas ce que tu veux faire plus tard. Je doute pouvoir t'aider à trouver ta voie, dit Mina après avoir réfléchi quelques secondes.
Voilà pourquoi je me sens perdu… Je veux faire quelque chose qui me plaise et dans laquelle je peux m'épanouir. Le fait de travailler dans ce journal n'est qu'une voie de garage mais ce n'est pas là où je vais trouver mon bonheur.
J'avais compris que cela ne te plaisait pas plus que ça mais pour trouver une solution à ton problème, il faudrait que tu saches ce qui pourrait t'épanouir, comme tu le dis. »
Tout à coup, le semblant de sourire sur le visage de Warren changea en une expression un peu contrariée. Voilà justement le noyau du problème : qu'est-ce qui pouvait le rendre heureux ? Il ferma les yeux…
… Lorsqu'il les rouvrit, il se trouvait toujours au beau milieu des toilettes, à moitié adossé contre le mur. La silhouette phosphorescente de Deneb avait disparu, le laissant bel et bien seul face à lui-même. Cela faisait une semaine que Mina lui avait posé cette interrogation, et depuis cette semaine, il n'avait pas été en mesure d'y trouver une réponse convenable. Seul le clignotement du néon obsolète troublait le silence qui régnait dans ces toilettes. Sans trop s'éterniser, il se redressa et sortit des toilettes avant de revenir dans sa salle de travail, sous les yeux étonnés, curieux, mais surtout furieux de Manami.
« Où étiez-vous ? demanda-t-elle. »
Désireux de l'énerver avec un vent à défriser les moutons du nord de l'Irlande, Warren soupira et n'osa même pas lui répondre, à tel point que Manami lui agrippa l'arrière du col et l'entraîna de nouveau en dehors de la salle de travail, sous les yeux complètement écarquillés des autres membres du groupe. Le jeune homme savait qu'il risquait gros lorsque sa cheffe était “un peu” agacée et que son tempérament sanguin prenait le dessus. Une fois tous les deux dans le couloir, la séance de reproches pouvait enfin commencer :
« Expliquez-moi ce qui ne va pas, et tout de suite ! ordonna-t-elle. »
Manami n'était pas le genre de femme avec qui il fallait jouer sur les nerfs. En effet, lorsque quelque chose ne lui plaisait pas du tout, elle pouvait aller jusqu'à gifler la personne qui lui a déplu, tout en lui offrant quelque chose à boire juste après pour se faire pardonner. Elle n'était pas pour autant détestée, Warren l'appréciait beaucoup parce qu'elle pouvait se montrer gentille… parfois. “Elle serait bien dans ton dojo”, avait-il dit à Dan lorsqu'il l'avait rencontrée pour la première fois.
« Je suis cruellement fatigué et…
- Et alors ? Dormez un… »
Warren l'interrompit d'un signe de la main, un peu du même acabit que celui utilisé par Dan lorsque l'envie lui prenait d'interrompre son interlocuteur pour x raison. En gros, il posait sa paume à moins de deux centimètres de la bouche de son interlocutrice et cela suffisait amplement pour qu'il puisse exposer ses arguments. Parfois, il posait aussi son autre index sur ses lèvres, lui donnant implicitement l'ordre de ne plus l'ouvrir.
« Calmez-vous un petit peu, dit Warren avec un ton de voix incroyablement calme. Je ne vois pas pourquoi vous êtes aussi agressive. »
Il retira sa main de devant la bouche de Manami, qui se sentit clairement outrée devant cette impertinence. Pourtant, elle ne réagit nullement, attendant le bon moment pour asséner une torgnole dans le visage de Warren avant peut-être de le renvoyer.
« Je sais ce qui vous démange, Manami, dit-il en posant ses mains sur ses épaules et en la regardant droit dans les yeux. Je le sais, je le sens. Vous avez envie de me démolir, de me rabaisser encore plus bas que je ne l'ai jamais imaginé. Est-ce que je me trompe ? »
Elle ne réagit pas. Tout à coup, Warren se sentit revivre et son sourire reprit sa place.
« Vos pensées ne peuvent m'échapper tellement elles jaillissent à travers les pores de votre épiderme. Si vous voulez me renvoyer, je ne m'opposerai pas à votre décision mais… songez à ce que quelqu'un comme moi peut imaginer en représailles. Vous me connaissez, tout le monde me connaît, mes origines, mon ascendance, mes torts… et c'est bien ce qui me dérange. »
Il marqua un temps de pause, histoire de se rendre compte de l'effet produit par ses petites phrases sur le tempérament de son interlocutrice. Elle était comme paralysée. Manami Houjo était complètement aphone. Warren agissait un peu comme Dan en Duel, sans pitié pour la personne en face d'elle. En voyant cette passivité, il continua son petit monologue, en marquant son ton de voix sur chaque mot :
« Essayez un peu de vous mettre à ma place, même si c'est loin d'être facile pour quelqu'un comme vous. Je ne suis pas un démon, ni un fumiste, ni tout ce que vous pensez… J'aimerais juste que vous cessiez d'agir comme un immonde tyran. Apprenez à foutre la paix aux autres et ne pas leur demander de se tuer à la tâche… rien de plus. »
Et il retira ses mains des épaules de Manami, avant de reculer de deux pas. Ses mains glissèrent dans ses poches et, alors qu'il retournait travailler, elle répondit à son tour, tête basse :
« Veu… Veuillez m'excuser, Warren. »
Il s'arrêta net, tournant la tête de façon à avoir sa cheffe de travail dans le coin de son champ de vision. L'air affiché par son visage fut celui d'une femme attristée devant une nouvelle tragique. Elle ne put s'empêcher de respirer profondément, cachant sans doute une larme par sa longue chevelure aux reflets ocre havane. Pour la première fois, Warren l'a entendue s'excuser, ce qui était pour lui d'une jouissance incroyable. Il se retourna complètement et dit avec un léger sourire :
« Excuses acceptées. Je retourne travailler à présent. »
Il retourna aussitôt à son travail, suivi ensuite par la rédactrice en chef, la mine basse. Tout le monde se demandait ce qui a bien pu se passer. En fait, Manami avait prévu de renvoyer Warren mais elle n'avait pas le courage de le lui dire en face. Elle le trouvait vraiment trop feignant – ce qui n'était pas toujours faux –, même si son avis n'était que le sien et que ses collègues étaient très satisfaits de la masse considérable de travail qu'il fournissait depuis des mois. Manami trouvait qu'il ne s'impliquait pas assez et se doutait bien que c'était un choix par défaut. Elle le savait même au moment où elle avait défié Dan en Duel pour le faire intégrer à l'équipe rédactionnelle, demande qui le fit hurler de rire. Elle savait qu'il s'ennuyait à mourir devant un ordinateur, à feuilleter les éditions numériques de magazines et autres torchons. Pourtant, elle s'était résolue à le laisser dans cette voie.
De son côté, Warren se remit à faire ce pourquoi il était là, bien que cela l'épuisât. De temps à autre, il jetait un bref coup d'œil par dessus son ordinateur pour voir si elle ne le fusillait pas du regard. Mais cela n'était pas le cas. Jusqu'à la fin de la journée, et même lors de la pause déjeuner, l'irascible Manami Houjo était alors devenue tout ce qu'il y avait de plus calme, se joignant même à la table de toute l'équipe, chose quasiment inédite.
Lorsqu'il rentra, il fut accueilli par Veneko qui venait passer la soirée à Kamen Street. C'était une routine tout à fait agréable. Il posa son sac et alla aider Mina à préparer le dîner. Veneko mettait la table. Pendant ce temps, Dan était dans la salle d'entraînement avec Nejma, qui lui demandait souvent de lui apprendre deux ou trois mouvement d'auto-défense. On entendait la voix de Dan qui hurlait avant de frapper un mannequin d'entraînement. Veneko dit à Warren que Nejma attendait avec impatience l'ouverture du dojo, qui aura lieu dans deux jours.
Trois quarts d'heure plus tard, les cinq personnes se retrouvèrent autour de la table, avec une ambiance totalement conviviale. Vint ensuite les discussions autour de la table, et avec un sujet particulièrement intéressant lancé par Veneko :
« Dites-moi, vous ferez quoi dans quelques années ? »
Le premier à répondre fut Dan, et Mina écouta attentivement ce qu'il allait dire :
« J'avoue que je resterais bien ici.
- T'es sérieux ? répondit Mina. Tu n'as pas envie de voir autre chose qu'Akinokuwa ?
- J'ai été aux quatre coins du monde, donc en toute honnêteté, bof… Bien sûr, cela ne veut pas dire que je veux éternellement rester dans cette ville et ne plus en sortir comme dans un couvent, mais c'est juste que j'adore cette ville. Sinon, le seul endroit où je me verrais vivre, c'est dans l'État familial des Lotyuwi, le Nebraska et sa douce ville d'Omaha. »
Les autres se souvinrent que les ancêtres de Dan venaient des États-Unis. D'ailleurs, Mina se rappela que Theodore, l'arrière-grand-père de Dan presque centenaire devait passer à la maison dans trois semaines. Elle comprit l'attachement que son fiancé pouvait avoir à la fois pour cette ville, qui les a vus grandir.
« Mina, si jamais tu veux qu'on découvre le monde tous les deux, je n'y vois aucun problème et je serais plus qu'heureux qu'on se fasse un petit tour du monde. »
Dans son esprit, la jeune femme était tout à fait ravie. Elle avait quitté cette ville à de rares occasions, comme en témoignait ces photos d'elle avec ses parents en Angleterre ou bien aux chutes du Niagara. À présent libérée du poids de l'absence parentale, elle pouvait enfin aspirer à faire autre chose que s'occuper d'une maison. De son côté, Dan la regarda attentivement et vit une certaine joie jaillir de ses yeux.
« Et toi, Warren ? dit Mina. Est-ce que tu sais ce que tu veux faire plus tard ? »
Il s'attendait forcément à ce qu'on lui posât cette question, surtout de la part de Mina. Il avait toujours en tête ce qui s'était passé ce matin-là, ainsi que la semaine dernière. Et lors de sa réflexion, il avait encore et toujours la même réponse en tête : “Je ne sais pas”. Pourtant, il voulait essayer de dire autre chose :
« J'aimerais bien découvrir le monde. M'installer à l'étranger, peut-être… Mais quant à savoir quoi faire précisément, je ne sais pas tellement.
- C'est pourtant quelque chose qui t'intéresse, le journalisme ? demanda Nejma.
- Ben, quand tu vois l'autre furie te gueuler dessus parce que tu es sorti pisser sans son autorisation, tu comprends mon hésitation, plaisanta ce dernier. »
Dan pouffa de rire par la même occasion. Mais il comprenait aussi à quel point ce n'était pas sa tasse de thé. Puis, Veneko posa une question :
« Sinon, tu pourrais faire quelque chose en Duel, non ?
C'est-à-dire ?
Je ne sais pas. Tenter de devenir champion du monde, ce n'est pas quelque chose qui te tente ? »
Tout à coup, la remarque de Veneko laissa Warren songeur. C'est vrai qu'il avait songé à entamer une carrière dans les ligues mondiales. D'ailleurs, il y a quelques mois, avant leur troisième finale du Golden Tournament, dans une interview, Dan et Warren en avaient parlé comme d'une éventualité. Dan a avoué avoir reçu des offres de la part de certaines ligues, avec des contrats extrêmement lucratifs. Même s'il était vraiment intéressé, il préférait prendre le temps de réfléchir. Quant à Warren, il était vraiment tenté mais ce qui l'inquiétait le plus, c'était de trouver quelque chose d'autre à faire. Une carrière de Duelliste, cela pouvait se tenter, mais les risques de tomber dans l'oisiveté après le tout dernier Duel étaient immensément grandes. Néanmoins, il y avait là pour Warren de la matière à réfléchir.
« Et vous ? interrogea Dan.
- Ben, je pense que c'est quelque chose qui va vous passer au-dessus mais si je pouvais faire partie de l'équipe de base-ball, ça serait hyper chouette, s'exclama Veneko.
- Ah oui, c'est vrai que tu t'étais inscrit dans l'équipe du lycée, dit Mina.
- Au moins trois home-runs par partie lors des quinze premiers matchs, vantait-il, tout fier qu'il était.
- Regardez-moi le futur Babe Ruth qui se pavane, plaisantait Dan, tandis que Veneko mimait un coup de batte tout en se magnifiant. »
Cela faisait bien rire tout le monde, y compris l'intéressé. C'était quelque chose qui le passionnait depuis des années. Et ses parents s'y étaient toujours opposés, du moins, jusqu'à ce que leur manipulation par deux Démons et leur sauvetage aient changé ce point de vue. Il s'était acheté une balle, un gant, une batte et s'imaginait être un champion, à l'insu de ses parents, qui espéraient tellement que lui et Nejma reprenne un jour les affaires familiales. Le seul problème de Veneko, du moins, l'un d'entre eux, c'était :
« Et les cours sinon ? demandait Mina.
- Les… quoi ?
- Au fait, je ne t'ai pas demandé si tu avais réussi ton interro d'histoire sur la Guerre froide.
- Euh…, dit-il en se tenant le menton, avec un air sarcastique qui trahissait tellement le fond de ses pensées. C'était bien Nixon qui s'est pris deux balles dans la tête le 22 novembre 1963 ? Tirées par des russes depuis Cuba ?… Non ? »
Nejma sourit en faisant un signe de tête négatif. Un “aïe” suivit ensuite, sous les éclats de rire de Dan, Mina et Warren, assistant à un cours d'histoire uchronique. Elle n'osa pas embrayer sur ses chances de dégoter une bonne note à l'interrogation de maths portant sur les logarithmes népériens, même si c'était pourtant une discipline dans laquelle elle et son frère étaient doués. Tout ce qui trottait dans la tête de Veneko à ce moment-là, c'était de s'imaginer jouer au Kōshien à la fin de l'année, ce qui était en bonne voie puisque l'équipe du lycée faisait partie des meilleures du pays. Et c'était sans doute un rêve qui pouvait se concrétiser d'ici quelques mois.
« Et toi, Nejma ?
- Moi ? Euh…, bafouilla la jeune lycéenne. À vrai dire… je n'ai pas vraiment d'idée… du moins, pas encore… mais je sais surtout ce que je ne veux pas faire.
- Ah ? C'est-à-dire ?
- Reprendre le travail de nos parents. Et j'aimerais vivre le plus loin possible d'eux.
- Et c'est reparti…, pensa Veneko.
- Pourquoi ? demanda Mina, visiblement très curieuse.
- Parce que…, commença Nejma avant d'être coupée par son frère.
- Calme-toi. Ce n'est pas la peine de déverser à nouveau toute ta haine pour eux. »
Ce fut à ce moment précis que Mina fit un signe de la main à Nejma pour lui murmurer quelque chose. Toutes les deux se levèrent de table et montèrent à l'étage, laissant les garçons complètement stupéfaits devant ce qui se déroulait sous leurs yeux. Une fois que Mina et Nejma étaient à l'étage, celle-ci l'emmena jusqu'à sa chambre et s'assit en tailleur sur le lit.
« Pourquoi m'as-tu amenée jusqu'ici ?
Assieds-toi, répondit-elle avec calme.
Euh, je ne suis pas sûre de comprendre ce que tu veux, Mina, dit-elle en s'asseyant également en tailleur.
Est-ce que je peux te poser quelques questions ?
De quel ordre ?
Vie privée. À moins que cela ne te dérange.
Ben, tu sais bien que j'aime beaucoup te faire part de mes problèmes parce que tu es mon amie et que ton aide m'est toujours précieuse.
Je te remercie du compliment, sourit Mina, laissant transparaître un léger rougissement.
Alors, je t'écoute. Quelles sont tes questions ? »
Mina était prête à analyser le comportement de Nejma et celle-ci était consentante quant au dévoilement de sa vie privée. Elle avait pris soin de verrouiller la porte, afin de ne pas être dérangée.
« Comment décrirais-tu ta mère ?
- Ma… mère ? Pourquoi est-ce que tu veux que je parle d'elle ?
- Je veux juste savoir quels sont tes rapports avec elle, c'est tout.
- Je n'adresse plus la parole à cette immonde femme, ce sac d'ovules, à cette buse en rut perpétuel. Et ça doit faire un sacré moment que c'est le cas. »
“Wow !” se dit Mina en griffonnant quelques notes sur son bloc. Elle savait que Nejma n'aimait pas ses parents, mais pas à ce point-là. Elle tenta alors de passer sur une autre question, mais Nejma l'interrompit :
« Cette femme ne sait même pas ce qu'est une famille. Trop occupée à gérer son stock d'employés. Trop occupée à se gaver dans des restaurants hyper chics avec ce vieux débris, cet affreux dégarni aigri qu'est mon père. Faire des enfants pour avoir une descendance, c'est compréhensible. En faire le plus possible pour montrer qu'on sait les élever. Les élever au grain comme des animaux qu'on enverrait à l'abattoir et…
- Stop ! coupa Mina d'un geste de la main. Respire un grand coup et calme-toi. Tu es vraiment trop nerveuse, Nejma »
La jeune fille s'exécuta. Elle ne fit plus aucun bruit. Mina griffonna de nouveau quelques notes et dit :
« En tout cas, il y a une chose de sûre, tu n'es pas atteinte du complexe d'Œdipe, juste de la haine pour tes parents.
- Pas besoin d'être psychologue pour savoir ça.
- Ta haine envers tes parents est liée à un traumatisme qui fait que tu t'es éloignée d'eux et que tu n'as visiblement pas cherché à renouer le contact. Est-ce que tu veux m'en parler, si tu t'en sens capable ?
- Ça ne devrait pas être trop compliqué…
- Je t'écoute.
- À vrai dire, ils n'ont jamais été là pour nous avec Veneko. Vivre dans une famille de cadres supérieurs qui prennent un malin plaisir à mépriser tous ceux qui leurs sont inférieurs dans la hiérarchie économique et sociale… cette idée répugnante du renvoi par manque de capacités productives, ça me dégoûte. Et quand tu es l'aînée d'une fratrie, tu as un amas de responsabilités qui est nettement plus conséquent parce que la moindre bavure dans leur éducation te revient. Combien de fois ils nous ont gueulés dessus, Veneko et moi, parce qu'on n'a pas réussi à les aider pour leurs devoirs ou pour les tâches de la maison… Je ne sais pas si tu t'en rends compte mais une famille plus qu'aisée n'assure pas forcément un bon train de vie.
- À vrai dire… j'ai bien vécu un bout de temps toute seule, se dit Mina en continuant d'écrire, tout en ressassant l'époque précédant son emménagement chez Dan.
- Jamais nous n'avons eu ne serait-ce que la moindre marque de soutien. Le prestige, les honneurs, l'excellence, ça et l'argent à flots, c'est tout ce qui compte pour eux. Et encore, Veneko a réussi à attirer leur attention avec ses derniers résultats en base-ball, ce qui contraste largement avec ses bulletins. En ce qui me concerne, ils ont un encéphalogramme plat quand ils reçoivent un bulletin ou bien quand ils passent furtivement sur les résultats du Golden Tournament.
- Pas sûr que le torchon enflammé s'éteigne avec un tel mépris…
- Il y avait bien ce moment dans notre maison, lorsque nous nous sommes battus contre Dilvolg et Andralon et qu'ils contrôlaient leur esprit. Là, j'avais une once de compassion envers mes parents mais ça a vite coupé court.
- Tu n'en parles pas beaucoup, tout comme ton frère.
- À vrai dire, Veneko se réconcilie petit à petit avec eux. Mais j'aurai toujours leur décision de nous faire travailler dans l'entreprise familiale, décision qu'ils ont jugée “irrévocable”.
- Et tu leur as manifestement exprimé ton point de vue de façon argumentée ?
- C'est à peine s'ils osent m'écouter. »
Mina vit l'expression attristée de son amie et pensait qu'elle devrait essayer de se réconcilier avec eux, peu importe son ressentiment envers eux. Elle essayait de trouver une corrélation entre tout cela et certains comportements qu'elle a récemment adopté, comme le fait qu'elle se soit tournée vers le végétalisme, l'environnementalisme, le yoga ou encore d'autres choses. Mina pouvait comprendre ce genre de comportements, qu'elle pouvait encourager – d'ailleurs, Dan préparait à chaque fois les plats de Nejma lorsqu'elle venait à la maison –. La première conclusion qu'elle a pu tirer des propos de son amie pouvait s'avérer vraie.
« Est-ce que mon cas n'est pas trop désespéré ?
- À vrai dire, j'essaye d'appliquer ce que j'étudie, avoua-t-elle, un peu gênée. Je ne suis pas une professionnelle dans le domaine mais tout ce que je peux te dire, d'après ce que j'ai pu constater, c'est que tu rejettes tes parents parce qu'ils t'ont abandonnée, en quelque sorte.
- J'arrive à comprendre… du moins, un peu.
- C'est un peu ce qui m'est arrivée. On a grandi toutes les deux sans véritable attention parentale. Occupés par leur travail, leur devoir parental passe au second plan et cela les a conduit à nous délaisser. Mais je voudrais te poser une dernière question.
- Vas-y.
- Est-ce que tu penses te réconcilier avec eux un jour où l'autre ? »
Sans même réfléchir, Nejma répondit avec une voix dévoilant sa conviction et sa fermeté :
« Absolument pas. »
Mina n'en demanda pas plus à son amie et la remercia d'avoir voulu se confier un peu. Toutes les deux descendirent pour le dessert. Warren était parti fumer une cigarette dehors, Dan et Veneko discutaient à propos de base-ball. En voyant sa sœur redescendre, le visage légèrement contrarié, il ne put s'empêcher de demander :
« Tout va bien ?
- À merveille, répondit sa sœur en lui souriant, pour ne pas l'inquiéter davantage. »
Visiblement, cela suffit à le focaliser de nouveau sur l'assortiment de dessert concocté par Dan et Mina. Warren rentra alors à l'intérieur de la maison, tout en évitant de déranger Mina avec l'odeur de tabac qu'il traînait derrière lui. La fin du repas se déroula dans une bonne ambiance, rien de plus. Puis, Nejma demanda de nouveau à Dan de lui montrer un ou deux nouveaux mouvements d'auto-défense, ce à quoi ce dernier répondit :
« Est-ce que tu peux attendre deux jours ?
- Pourquoi ?
- Parce que dans deux jours, mon dojo ouvrira enfin, dit-il avec un énorme sourire.
- Tu risques de me voir très souvent alors, plaisanta Nejma. »
Dan avait vraiment hâte que ce jour arrive. Pour lui, cela sonnait comme une libération, comme un prisonnier qui attendait avec impatience le jour de sa libération définitive. Mina le regardait et elle ne pouvait que se réjouir du bonheur qui envahissait son fiancé.
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|